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Agriculture biologique« L’agriculture conventionnelle nourrit les mauvaises herbes »

« Le bio n’est pas une diversification, c’est un mode de production qui impose d’accepter ses règles », estime François Mellon, agriculteur biologique dans le pays de Thelle (Oise).
« Le bio n’est pas une diversification, c’est un mode de production qui impose d’accepter ses règles », estime François Mellon, agriculteur biologique dans le pays de Thelle (Oise).

François Mellon, céréalier à Villotran (Oise), a commencé l’agriculture biologique il y a 19 ans. Ce pionnier, sans idéologie, est devenu un fervent défenseur de ce mode de production. En plus des céréales produites pour la multiplication de semences, il cultive aujourd’hui des plantes pour l’alimentation humaine, telles les lentilles, la cameline, la rhubarbe ou encore la courge. Pour réussir en bio, il faut, selon lui, être capable de faire évoluer son esprit et accepter les règles.

Depuis l’an 2000, François Mellon, exploitant 120 ha de surface agricole utile (SAU) à Villotran (Oise), produit des cultures biologiques. Autant dire qu’il a essuyé les plâtres, à ses débuts, en raison du manque de connaissances techniques.

« J’en avais simplement marre de l’agriculture conventionnelle, explique ce pionnier. Se convertir au bio aujourd’hui n’est sans doute plus une aventure aussi compliquée qu’à l’époque. Il faut faire évoluer son esprit et ne pas appliquer les méthodes conventionnelles. Cette technique se révèle plus aléatoire. Le rendement en blé peut varier entre 25 et 55 q/ha, contre environ 90 q/ha de potentiel en conventionnel sur mes terres de limons battants. Mais les revenus s’avèrent relativement constants, car le marché se caractérise, jusqu’à présent, par sa stabilité. »

À ses débuts, l’agriculteur profite d’un soutien financier via un contrat territorial d’exploitation (CTE) puis d’aides à la conversion et au maintien au bio. Cet homme sans idéologie mais pragmatique s’appuie sur des leviers agronomiques pour s’en sortir. Il introduit notamment la luzerne dans sa rotation, une culture indispensable à la réussite d’une conversion, selon lui, en raison de ses capacités de nettoyage, d’enrichissement du sol et de restructuration. L’agriculteur la vend à une usine de déshydratation voisine mettant en place une filière bio. Petit à petit, il diversifie son assolement.

« Sept à huit cultures au minimum s’avèrent indispensables dans la rotation, tant du point de vue agronomique que pour se prémunir d’éventuelles chutes de rendement de l’une d’entre elles. »
Les lentilles, l’huile de cameline ou encore la rhubarbe sont vendues en direct et distribuées également via de petits magasins de producteurs ou par les associations spécialisées La Ruche qui dit Oui ! et AMAP.

François Mellon implante ainsi de la luzerne, du blé, de l’épeautre, du triticale, mélangé ou pas à de la féverolle, de l’orge, des courges, de la rhubarbe et des lentilles associées à de la cameline comme plante tuteur. Il ne produit quasiment que ses céréales en contrat de multiplication de semence. Il doit donc empêcher la colonisation de ses parcelles par les adventices. 

« Les champs ne sont pas beaucoup plus sales qu’avant, constate l’agriculteur. Le salissement n’est pas irréversible. Il faut être vigilant lors du semis de la culture. »
François Mellon met tout en œuvre pour limiter le salissement des parcelles : ici, un triticale associé à une féverolle comme plante de couverture, tous deux étant récoltés simultanément et commercialisés.

Tirer profit des leviers agronomiques

Le principal levier dans la gestion du désherbage est agronomique. « Le meilleur outil reste la charrue, déclare François Mellon. Les cultures doivent être en avance sur les adventices. Les dates de semis sont retardées, entre le 5 et le 10 novembre environ pour un blé d’hiver. » 

L’agriculteur multiplie les faux-semis, notamment avant les cultures de printemps semées tardivement, comme l’association de cameline et de lentille, implantées courant avril, ou encore la courge, semée au mois de mai. Il choisit des cultures qui nettoient naturellement les champs, comme la luzerne qui reste trois ans sur une même parcelle ou des espèces poussantes qui étouffent les mauvaises herbes. Il veille également à couvrir au maximum le sol, en implantant des cultures intermédiaires ou en associant des espèces. Il sème par exemple du trèfle dans le blé, ou mélange de la féverolle avec du triticale qu’il récolte simultanément. Si nécessaire, il utilise également des outils de désherbage mécanique, telles une herse étrille Treffler pour les céréales, une bineuse ou une fraise rotative à interrangs pour les autres cultures.

La rhubarbe (ci-dessus) nécessite 1 000 h/ha/an de temps de travail. Elle est désherbée manuellement et mécaniquement à l’aide d’une fraise rotative à interrangs (ci-dessous) travaillant dans un sens et sa perpendiculaire.

Du côté des maladies, l’agriculteur ne semble pas préoccupé outre mesure : « Les céréales ne développent ni fusariose ni oïdium. La rouille jaune existe, mais elle est contrôlée par la résistance variétale. Un équilibre se crée en appliquant certaines astuces afin de limiter la propagation des nuisibles. » Le facteur limitant reste la ressource en éléments minéraux. « Même si le système dans son ensemble ne nécessite pas trop le recours à l’engrais, la production reste tributaire de l’azote dans le sol. Des fertilisants sont en effet autorisés en bio mais ils s’avèrent rares et chers, constate l’agriculteur. L’azote peut être produit en interne, via les cultures de l’assolement, mais l’apport en potasse ou en phosphore pourrait devenir problématique si la législation se durcit. »

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