Depuis quatre ans, l’entreprise de travaux agricoles Jouanolle, installée en Ille-et-Vilaine, travaille en étroite collaboration avec la Sica Agrammo, fournisseur de solutions azotées, et la SARL Somatam, concepteur de la technique d’enfouissement. La localisation de l’engrais en sous-sol présente des intérêts non seulement agronomiques, mais aussi sur les plans technique et environnemental.
L’entreprise de travaux agricoles Jouanolle, située à Bourgbarré, en Ille-et-Vilaine, a investi il y a quatre ans dans un équipement d’enfouissement de l’azote liquide. Elle facture la prestation à ses clients, qui achètent la solution azotée à la Sica Agrammo. À l’issue des commandes de l’engrais passées en hiver, l'entreprise reçoit un listing pour identifier les clients demandeurs et connaître les doses à apporter. L’organisation des chantiers, réalisés principalement au sud de Vitré et au sud de Rennes (Ille-et-Vilaine), est désormais rodée. Elle s’effectue conjointement avec le fournisseur d’azote liquide.

Débit proportionnel à l’avancement
D’un point de vue technique, le localisateur de l’engrais, sous forme d’azote liquide, comprend un outil à dents de huit rangs répartis sur 6 m de large, sur lequel prend place une cuve de 1 500 L. Chaque dent droite creuse un sillon d’une profondeur de 15 cm entre les rangs de maïs. Des roues de jauge favorisent l’homogénéité de la profondeur de travail. L’effet fissurateur de la dent bénéficie en outre au développement racinaire de la culture grâce à l’aération du sol.
Le GPS renseigne la vitesse réelle d’avancement du tracteur et transmet l’information au système de régulation de débit DPAE Dickey-John. Le flux est ensuite calibré via une pastille positionnée en amont de chaque descente de manière à obtenir la bonne dose à l’hectare. La solution azotée est ainsi injectée dans le sol via un tube doté d’une sortie de 3 mm fixée derrière la dent de type coutre. Le sillon est ensuite refermé par deux spatules de recouvrement. Le ravitaillement de la cuve se fait au champ. Une citerne roulante de 5 000 L stocke la solution azotée, approvisionnée par camion depuis la Sica Agrammo. Le remplissage de l’enfouisseur se fait au moyen d’une pompe thermique située à l’arrière de la cuve tampon.
Un ordinateur de bord renseigne le dosage à l’hectare
Les clients demandent essentiellement un apport de la solution N39. Celle-ci contient 30 % d’azote, dont 7,3 % d’azote nitrique, 7,3 % d’azote ammoniacal et 15,4 % d’azote uréique, le tout parfois mélangé avec un biofertilisant 100 % végétal nommé « Chamaé ». Ce dernier est aussi agréé en agriculture biologique. Le chauffeur renseigne en cabine, sur un ordinateur de bord, le dosage à l’hectare à apporter en tenant compte de la densité de la solution azotée (soit 1,3 pour le N39).
Il dispose d’un abaque déterminant le volume correspondant aux unités d’azote souhaitées. Une dose à l’hectare de 180 L de solution liquide correspond à 70 unités d’azote. « Nous intervenons généralement de la mi-mai à la mi-juin, idéalement lorsque le maïs est au stade 4-6 feuilles. Un seul passage est nécessaire à une vitesse moyenne de 8 à 10 km/h. Le débit de chantier atteint 30 ha/j. Nous utilisons un tracteur de 140 ch muni de roues étroites pour limiter les dégâts sur les rangs de maïs », souligne Tony, premier chauffeur de l’équipement. En matière d’entretien, l’équipement nécessite un nettoyage régulier des socs de recouvrement et des pastilles, puis un rechargement des dents à la soudure.
Une valorisation optimale de la solution azotée par le maïs
L'une des volontés des éleveurs est de mieux maîtriser les apports d’azote sur maïs, qui varient entre 45 et 100 UN/ha. « Les éleveurs subissent une pression concernant les plans d’épandage et veulent mieux contrôler l’apport d’azote. Du fait d’un apport en localisé, l’application se fait au plus près des racines et avec une précision à cinq unités d’azote près. Cet équipement permet ainsi de booster le maïs en intervenant au bon moment et au bon endroit. La plante reste verte sans subir de stress, ce qui garantit sa bonne valeur alimentaire », constate Olivier, deuxième chauffeur de l’équipement et également éleveur. Un autre avantage réside dans l’enfouissement, qui limite le lessivage et les pertes par volatilisation, et garantit d’autant plus l’efficacité de la solution azotée.
L’investissement moyen pour cet équipement s’élève à 28 000 € HT. Pour le client final, le montant de la prestation est compris entre 85 et 95 €/ha selon la solution azotée et la quantité apportée, incluant l’achat, le transport et le stockage puis l’application de l’engrais. L’application seule de la solution azotée est facturée au client entre 33,5 et 38 €/ha. Gérante de l’ETA, Sabrina Jouanolle note un intérêt croissant de la part de ses clients : « Via cette prestation, nous ciblons une fois de plus les éleveurs. La satisfaction est au rendez-vous, et cette prestation donne du travail à nos salariés pendant une période où l’activité est plus calme. Nous nous appuyons sur la Sica Agrammo pour promouvoir la technique auprès de nos clients et, à terme, nous souhaitons progresser vers 450 ha. »
Repères
Une valeur de matière azotée totale équilibrée
La Sica Agrammo et la SARL Somatam, créées en 1991 à Châteaubourg, en Ille-et-Vilaine, ont développé cette technique de fertilisation des cultures. Lorsque l’année 2010 signe l’arrêt de l’approvisionnement en ammoniac par Total et Yara, bon nombre d’entreprises françaises (dont 14 travaillant avec la Sica Agrammo) se retrouvent avec leurs matériels sur les bras. Alors distributeur d’ammoniac agricole en Bretagne et concepteur d’une technique d’injection d’ammoniac dans le sol, Francis Legrand, gérant des deux sociétés, cherche une solution pour pallier cet arrêt. Lors d’un déplacement au Canada, il s’intéresse à la fertilisation avec solution azotée qui représente, outre-Atlantique, 40 % des pratiques culturales. Il met alors au point un concept d’application de solution azotée par enfouissement.
« Je vois la technique comme un moyen d’assurer la rentabilité économique des exploitations. C’est pourquoi j’ai testé le comportement de la solution azotée dans le sol, les réactions de la plante et la valeur nutritionnelle du maïs avec l’appui d’experts. Un kilo d’azote doit apporter 6,25 kg de matière azotée totale (MAT), et cette solution fait ses preuves en assurant une valeur MAT équilibrée de la plante et un rendement optimal en maïs grain », témoigne Francis Legrand. Les bénéfices de cet apport par enfouissement s’étalent sur une durée de trois à quatre mois grâce à la nitrification progressive. « L’azote apporté en profondeur se fixe sur le complexe argilo-humique. Essentiellement capté par les racines, il est directement assimilable par la plante. En effet, les coutres assurent une microfissuration du sol qui favorise l’enracinement en profondeur. Enfin, alors que l’apport d’ammonitrate représente un coût de 1,15 € par kilo d’azote, avec la solution azotée, ce montant descend à 0,90 €. »