À Chard, dans la Creuse, Thibaut Mongourd et ses parents, Jean-Luc et Sylvie, produisent chaque année 25 t de céréales qu’ils aplatissent et stockent en boudins. Jusqu’à l’hiver 2019, les associés du Gaec des Bariteaux distribuaient chaque jour cet aliment à la main à une centaine de bêtes. C’est à cette période que le jeune agriculteur, installé en 2016, a décidé de créer un outil réduisant la pénibilité de cette tâche. « Je suis parti d’une vieille cuve à fioul, confie-t-il. Celle-ci reposait déjà sur des pieds et avait une base conique. Elle peut embarquer environ 500 kg de grains. J’ai également récupéré deux rallonges de vis à grain qui ne servaient pas. » Après avoir découpé le haut de la cuve, Thibaut Mongourd a placé l’une des deux vis de manière à permettre le chargement, en collectant les céréales aplaties directement dans le boudin. Afin d’ajuster la hauteur de cette vis, il l’a fixée à l’extrémité d’un vérin électrique, anciennement dédié au liage au cœur d’une presse à balles rondes. Il a ensuite positionné la seconde vis sous le cône de la cuve, permettant ainsi la distribution du produit sur le côté droit.

Pesée embarquée autonome
Cette seconde vis est fixe, et sa hauteur de déversement autorise le remplissage des auges. « Pour connaître la quantité chargée, j’utilise deux barres de pesée qui servaient déjà sur la ferme. Je les ai installées sur deux essieux faits maison. Au départ, j’avais récupéré des petites roues de nettoyeur à haute pression, mais celles-ci ne supportaient pas la charge. Je les ai donc remplacées par des roues de faneuse. » Le boîtier de pesée embarque sa propre batterie. Il n’est ainsi pas nécessaire de le brancher pour afficher le poids chargé. « Son autonomie est largement suffisante, assure l’exploitant. Je ne le recharge qu’une ou deux fois pendant l’hiver. » Une tondeuse autoportée assure la traction de cette trémie mobile. Elle n’a coûté qu’une cinquantaine d’euros. Débarrassée de son plateau de tonte, elle s'équipe désormais d'un réservoir, d’une pompe et d’un distributeur hydrauliques. Ces composants, ainsi que l’un des deux moteurs hydrauliques dédiés aux vis, ont représenté un investissement d’un peu plus de 1 000 €.

Le châssis impose ses limites
« J’ai eu quelques soucis avec l’entraînement de la pompe hydraulique, relate l’agri-inventeur. J’ai réutilisé la courroie des lames et son système de tension. Mais l’effort appliqué provoquait la torsion du châssis de l’autoportée. » Un renfort au niveau du palier de la pompe a permis de régler ce problème, bien qu’une sangle à cliquet soit encore nécessaire pour contrer l’effet de traction de la courroie. Le distributeur, placé à côté du siège, commande l’animation des moteurs hydrauliques, lors du chargement et de la distribution. La sélection de la vis à faire tourner s’opère à l’aide d’une vanne à trois voies, positionnée sur la cuve. « J’aurais pu mettre deux distributeurs, mais cela coûtait plus cher et aurait pris plus de place sur le tracteur. La solution de la vanne s’avère simple et efficace. » La batterie d’origine de la tondeuse a aussi cédé sa place à un modèle plus imposant afin de permettre l’alimentation du vérin électrique relevant la vis. Un interrupteur est pour cela placé à côté du distributeur hydraulique.

Toujours des idées en tête
Après presque trois hivers d’utilisation, Thibaut Mongourd dresse le bilan. « Cet ensemble s’avère efficace. Il a nécessité, pour sa fabrication, environ 150 heures de main-d’œuvre, pour un coût de 1 130 €. Avant, nous faisions le boulot à la main. Nous avons donc quand même bien gagné au niveau confort et pénibilité. À l’usage, le tracteur-tondeuse consomme environ 5 L d’essence par semaine. Je ne souhaitais pas adapter la cuve sur un tracteur, pour ne pas avoir à démarrer un gros moteur pour cette tâche. En revanche, je pense tout de même adapter des fourreaux, afin de transporter la cuve sur les fourches à palettes du chariot télescopique. Ceci me permettra de remplir les nourrisseurs au champ l’été. Je voudrais aussi remplacer le moteur hydraulique de la vis de distribution. Celui-ci provient d’une désileuse et tourne trop lentement. Je réfléchis également à monter une balayeuse à l’avant de la tondeuse pour nettoyer les couloirs d’alimentation. C’est ça l’autoconstruction, il y a toujours quelque chose à faire ! », conclut l’agriculteur.

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Thibaut Mongourd a mis au point cet automoteur de distribution de grains aplatis pour limiter la pénibilité de la tâche. |