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MéthanisationMVS Énergie : la ration ne se limite pas à l'ensilage

L’unité de méthanisation de MVS Énergie ne compte que deux cellules ayant le rôle de digesteur pour l'une et de stockage pour l’autre.
L’unité de méthanisation de MVS Énergie ne compte que deux cellules ayant le rôle de digesteur pour l'une et de stockage pour l’autre. (©U.D.)

En Picardie, ces derniers temps, il n’est pas rare de voir des cellules aux dômes volumineux pousser comme des champignons. L’essor des sites de méthanisation bat en effet son plein dans cette région à dominante céréalière. Je suis allé à la rencontre de Thierry Deneufbourg, agriculteur à Saint-Martin-aux-Bois (Oise), pour une visite approfondie du méthaniseur récemment mis en route par MVS Énergie, une entreprise qu'il a créée en association avec trois autres exploitations céréalières voisines.

Les méthaniseurs se développent dans l’Hexagone. Il n’est plus rare d’observer jusqu’à quatre sites dans un rayon de 50 km. Si certains éleveurs peuvent se permettre d’installer leur propre méthaniseur alimenté par les déjections de leurs animaux, les céréaliers, eux, limités par le quota de production de céréales dédiées au méthaniseur, optent principalement pour une association avec des voisins afin de disposer de ressources suffisantes pour le fonctionnement d'une unité de méthanisation.

Le site de méthanisation de MVS Énergie dispose de trois silos d’une capacité de 7 500 t, composés d’ensilage de maïs, de sorgho et de seigle, ainsi que de pulpe de betteraves. (©U.D.)

C'est le cas de Thierry Deneufbourg, céréalier à Saint-Martin-aux-Bois (Oise), au nord de Clermont. En 2020, ce dernier s’est associé avec trois exploitations voisines, regroupant au total 1 400 ha de cultures, pour se diversifier et installer un site de méthanisation à Ménévillers, sous l’entité MVS Énergie SAS. Dans la plupart des cas, les méthaniseurs sont composés de trois cellules ayant les rôles de digesteur, post-digesteur et stockage.

L'incorporateur de matière brute (ensilage) offre une capacité de 85 m3 de marchandise. (©U.D.)

Lors de ma découverte du site, en fonctionnement depuis un an et demi, seules deux cellules sont visibles. L'absence d'un troisième dôme, loin d'être un oubli, s'explique facilement puisqu'il s'agit d’un système de méthanisation différent. Ici, sont uniquement présentes la cellule de stockage et celle du digesteur. Cette dernière est alimentée par le bol mixeur, mélangeant trois produits selon une recette définie chaque jour.

Le bol mixeur Kreis-Biogas-Dissolver, du constructeur EnviTec Biogas, mélange, en amont du digesteur, la matière brute (ensilage) ainsi que la recirculation de la matière organique du digesteur et le produit liquide du digestat. (©U.D.)

Une ration fluctuant selon la production de gaz souhaitée

Le bol mixeur, un modèle Kreis-Biogas-Dissolver du constructeur EnviTec Biogas, injecte dans le digesteur, sous un milieu anaérobie, une ration composée de matière brute – mélange d’ensilage de maïs, de sorgho, de seigle et de pulpe de betteraves – et de deux autres substrats correspondant à la recirculation de la matière organique du digesteur et à la partie liquide du digestat, obtenue par séparation de phase. La matière solide, quant à elle, est éjectée dans un silo dédié à cet effet. Cette recette est définie et étudiée chaque jour par un biologiste externe à l’entreprise MVS Énergie.

Le séparateur de phase éjecte les résidus solides qui sont poussés dans un silo à l'aide de la chargeuse. La texture de ces derniers est semblable à du compost (en médaillon). (©U.D.)
« Aujourd’hui, le biologiste nous a conseillé de réaliser le mélange suivant : 18 % de matière brute, soit 60 t, 42 % de recirculation et 40 % de digestat liquide, pour une ration journalière totale de 333 t, indique Thierry Deneufbourg. Le tonnage des trois produits de cette ration fluctue en fonction de la production de biogaz journalière souhaitée. Une quantité de matière brute et de substrats plus élevée augmentera ainsi le débit journalier de biogaz, visible en deux jours. »
(©U.D.)

Le processus de recirculation des substrats du digesteur assure une ration mixée au plus fin, à une température comprise entre 40 et 45 °C facilitant la fermentation dans le digesteur. Ce dernier, d’un volume de 4 620 m3, réalise un travail de fermentation et de brassage synthétisant le biogaz sur une période de 60 jours. Composé de méthane, de dioxyde de carbone ainsi que de vapeur d’eau et de soufre, le biogaz est ensuite acheminé dans la deuxième cellule, d’un volume de 2 640 m3.

« Cette deuxième cellule, dont le rôle principal est de stocker le digestat, assure également, par fermentation, la récupération de biogaz à hauteur de 1 à 2 %" », ajoute Thierry Deneufbourg.

Le digestat stocké sera par la suite transporté dans la lagune, à l’air libre, de 9 000 m3.

En amont des chantiers d’épandage, les résidus liquides et solides contenus dans la lagune, de 3 m de profondeur, sont homogénéisés à l’aide du mixeur à lisier. (©U.D.)

Une filtration drastique du biogaz

Une fois produit, le biogaz est dirigé vers la centrale de purification par canalisations souterraines. Ce processus de transport le refroidit afin d’éliminer une partie de son hygrométrie.

Le biogaz fraîchement sorti de la cellule de digestat est directement acheminé par voies souterraines à la centrale de filtration où il subit de drastiques réactions chimiques pour obtenir un taux de CH4 supérieur à 96 %. (©U.D.)
« Nous devons fournir un gaz pur composé de CH4, ajoute Thierry Deneufbourg. Pour y parvenir, le biogaz va subir trois filtrations. Tant que le taux de CH4 du gaz filtré ne dépasse pas 96 %, celui-ci est directement renvoyé à la première étape de filtration. »

L’eau présente dans le biogaz est éliminée par condensation à la suite de plusieurs cycles de variations de température allant de 16 à 50 °C. La chaleur émise lors du refroidissement peut être utilisée pour maintenir le digesteur à température lorsque cela est nécessaire. Le soufre, quant à lui, sera éliminé par des filtres à charbon actif.

En cas de panne d’une des machines du site de méthanisation, le brûleur permet la combustion du trop-plein de biogaz. Toutefois, la deuxième cellule, d’un volume de 2 640 m3, autorise sous son toit une autonomie de stockage du biogaz d’environ 6 heures. (©U.D.)
« Nous avons signé auprès du fournisseur de gaz un contrat avec une moyenne mensuelle de 250 Nm3/h [normo mètre cube par heure, ndlr]. En fournissant un débit plus élevé en début de mois, nous assurons nos arrières en cas d’éventuelles pannes sur le site, stoppant partiellement la production de gaz », complète Thierry Deneufbourg.

Un biogaz comprimé à 67 bar

Le site de méthanisation de Ménévillers se situe à moins de 100 m d’un réseau de transport de gaz appartenant à GRTgaz. Ce réseau dispose de canalisations reliant les différents points d’interconnexion avec le réseau de distribution GRDF alimentant les clients finaux.

« Lorsque nous travaillions sur le projet de création du site de méthanisation, nous avions également la possibilité de nous installer à Maignelay (Oise), à proximité d’un réseau GRDF. Toutefois, ce dernier, ayant le rôle d’alimenter directement les domiciles, n’aurait pas eu la capacité, en été, de stocker toute notre production de gaz », ajoute Thierry Deneufbourg.
Avant d’injecter le biogaz dans le réseau de transport GRTgaz, celui-ci est comprimé à 67 bar grâce au compresseur de gros volume. (©U.D.)

En effet, les canalisations de GRTgaz, de 250 ou 900 mm de diamètre, offrent une grande capacité de stockage, nécessitant, pour y accéder, que le biogaz soit sous une pression de 67 bar. Fraîchement filtré, celui-ci passe donc par une centrale de compression avant d’être envoyé dans le réseau.

« GRT a placé à la sortie de notre site sa propre centrale de contrôle de la qualité du gaz. C’est à ce niveau-ci que l’entreprise confirme le respect du contrat ainsi que la qualité du gaz, permettant par la suite notre rémunération », conclut Thierry Deneufbourg.
La lagune, d’un volume de 9 000 m3, est vidée pour des chantiers d’épandage, jusqu'à ce jour tous les sept mois. (©U.D.)
L’agrochargeuse JCB 427 assure le chargement journalier d’ensilage dans l'incorporateur. (©U.D.)

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