Tous les deux ans, la station de ski Les Gets, dans la Haute-Savoie, devient l’épicentre du monde de l’exploitation forestière. L’association Les Cognées y organise en effet son concours de débardage mécanisé. Au volant de leurs skidders (leurs débusqueurs), les participants se mesurent sur un parcours technique comptant de nombreux passages délicats, des pentes abruptes et des descentes glissantes. Chacun doit tirer une charge de quatre troncs. Le circuit est bordé d’arbres et de piquets que ni le tracteur, ni les troncs ne doivent toucher sous peine d’engranger des points de pénalité. Même si les épreuves sont chronométrées, le public assiste plus à une démonstration du savoir-faire exceptionnel de ces conducteurs qu’à une course de vitesse.

C'est donc en juin 2019 que s'est tenue la 8e édition de ce concours bisannuel. L'événement a réuni 18 compétiteurs et 6 marques : Camox (6 participants), HSM (4), Tigercat (4), Noe (2), Latil (1), issu du constructeur croate Hittner, et Caterpillar (1) avec un ancien modèle. L’épreuve s'est déroulée en deux manches, la première le samedi après-midi et la seconde le dimanche. Le public s’était massé aux abords de la piste pour admirer ce show mécanique. Certains supporters survoltés avaient emporté des tronçonneuses, dont le guide-chaîne et le pot d’échappement avaient été démontés. Les pétarades de leurs machines ont contribué à soutenir les compétiteurs et participé à l’ambiance festive.

Conduire du bout des doigts
Certains débusqueurs étaient équipés d’une grue. Le conducteur maniait alors sa charge à l’aide de son grappin pour faire glisser les troncs d’un côté ou de l’autre, leur évitant ainsi de toucher les obstacles. Pour les modèles dotés de treuils, la manœuvre n’était pas moins délicate. Le conducteur attachait un câble à l’avant de la traîne – le paquet de troncs – et un autre au milieu. Il jouait ensuite sur la tension de l’un puis de l’autre pour faire avancer ou pivoter son chargement. Mais pour que la manœuvre fonctionne, le placement du skidder devait être parfait.

Certains n’hésitaient pas à placer leur tracteur en travers de la piste et à faire tirer leurs treuils jusqu’à ce que l’engin se soulève. Ils relâchaient alors la tension, se remettaient en place et recommençaient l’opération. Le public retenait son souffle à l’approche des passages les plus techniques. Les mastodontes d’acier faisaient preuve d’une délicatesse et d’une précision époustouflantes. Ils se désarticulaient pour traverser les trous boueux, s’agrippaient dans les montées, s’appuyaient sur leurs lames pour maîtriser les descentes. Leurs blocs diesels faisaient leurs vocalises sur ce tracé dans les bois, pour le plus grand plaisir des passionnés.

Réunion de famille
Au-delà de la compétition, les concurrents font preuve d’une réelle solidarité entre eux. Ces hommes, qui connaissent bien la rigueur du travail sur des terrains accidentés, n’hésitent jamais à donner un coup de main au collègue en difficulté. Ainsi, lorsqu’un concurrent ne parvient pas à grimper une côte trop raide, un autre compétiteur place son skidder au sommet et lui vient en aide en utilisant son treuil. Le monde de l’exploitation forestière, c’est aussi cette fraternité, le fait de savoir que l’on peut compter les uns sur les autres. Dans cette ambiance, les professionnels accueillent sans a priori les passionnés ou les simples curieux, venus découvrir, le temps d’une journée, la réalité de leur métier. Cet événement est aussi l’occasion d’approcher quelques machines hors du commun présentées dans l’espace d’exposition.

Cette année, aux côtés des tracteurs et des équipements forestiers, des broyeurs à plaquettes se pliaient ainsi à des démonstrations. Une pelle araignée escaladait un talus, faisant preuve de son aptitude à atteindre tous les chantiers. Le public a également assisté à une séance de débardage par câble-mât. Mais le plus impressionnant fut l’arrivée d’un hélicoptère écureuil capable de transporter des rondins par les airs. Ces deux jours de fête se sont conclus par la remise des prix du concours, dont la première place a été décrochée par Stéphane Bato, de l’entreprise Dumoulin Débardage. Au volant de son Camox F175 équipé d’une grue, le vainqueur n’a cumulé que dix points de pénalité en deux manches. Il a été suivi par Hilaire Chauvin, deuxième, au volant d’un skidder identique et par Romain Kientzy, troisième, avec son HSM 904.
