Octobre 2017. La première phase du Challenge Centeol est lancée par la start-up Agreenculture dans une parcelle de 50 ha, aux alentours de Sens, dans l’Yonne. Un robot, juché sur deux chenilles, arpente le terrain en tractant un outil d’analyse du sol afin d’établir une carte précise de son potentiel. Il est animé par un moteur diesel de 30 ch. Il embarque des balises GPS lui permettant de se géolocaliser avec une précision centimétrique. Dès mars 2018, deux de ces véhicules autonomes s’affairent à préparer le sol, uniquement dans les sillons où sera implantée une culture de maïs. Leur capacité de traction leur autorise l’emploi d’outils larges de cinq rangs.

Malgré des passages plus serrés sur la parcelle, par rapport à un tracteur, leur faible tassement du sol a un impact divisé par deux sur la capacité d’infiltration de l’eau. Philippe Potier, responsable du bureau d’études chez Kuhn, partenaire du projet, explique : « Le passage des robots divise par cinq la capacité d’absorption d’eau du sol, par rapport à un terrain laissé sans culture. Les tracteurs et automoteurs, eux, la divisent par dix. Donc, même en faisant plus de traces en foulant 28 % de sol en plus qu’en itinéraire standard, les robots respectent mieux le sol. »

L’implantation décomposée
Au cours du mois suivant, trois robots sont de sortie pour implanter du maïs. Afin de limiter le tassement, les chercheurs ont préféré séparer l’application de l’engrais starter et le semis en deux opérations. L’un des véhicules autonomes se charge donc de déposer l’engrais en suivant six lignes tracées lors de la préparation du sol. Derrière lui, ses deux semblables reçoivent des éléments de semis monograines identiques à ceux du Kuhn Maxima. Tout comme leurs chenilles, les doseurs sont entraînés par des moteurs électriques. Afin d'en limiter le poids, chaque robot compte trois lignes de semis.

Les engins modulent en continu la densité de semis, en fonction du potentiel du sol, mesuré quelques mois plus tôt. Ils déposent ainsi moins de graines dans le terrain pauvre mais en sèment plus dans la terre riche. Les hommes n’interviennent que pour les ravitailler en bout de parcelle. Le réservoir de carburant de 41 L procure aux machines une autonomie de 24 heures de travail. Les robots obéissent à un superviseur doté d’une intelligence artificielle afin d’optimiser les trajets tout en évitant d’éventuelles collisions. Ils embarquent également leur propre dispositif de sécurité, composé d’un radar et d’un parechoc sensible au contact avec un obstacle.

La chasse aux mauvaises herbes
Au mois de mai, il est temps d’apporter un engrais post-levée au maïs. L’un des robots reçoit alors un pulvérisateur dont la rampe traite neuf rangs. La dose délivrée est ajustée en fonction des besoins des plantes. Ensuite, au cours du mois de juin, deux robots se voient équipés de bineuses à six rangs et réalisent jusqu’à trois passages afin d’éliminer les mauvaises herbes. S’ils ne se chargent pas de la récolte, les véhicules autonomes du Challenge Centeol ont réussi à mener à bien un itinéraire cultural quasi complet.

À la suite de cette saison d’essais, la start-up Agreenculture a pu valider son concept de culture mécanisée par de petits engins autonomes, dont l’impact sur le sol est plus faible que celui des pratiques habituelles. Elle met également en avant l’utilité d’une analyse approfondie du potentiel du terrain avant la mise en place des cultures. Les ressources sont ainsi mieux exploitées, et les besoins en intrants optimisés. Enfin, la robotisation des tâches mécanisées libère du temps à l’agriculteur, qui peut ainsi se concentrer sur le suivi de ses cultures, un peu comme un éleveur qui investit dans un robot de traite.
