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DécouverteLa récolte du lin fibre : un chantier d'exception

La récolte du lin fibre : un chantier d'exception

Le lin textile fait partie des espèces historiquement cultivées le long du littoral de la mer de la Manche, du Calvados aux Pays-Bas. Il exige un certain niveau d’expertise et de savoir-faire, ainsi que des matériels spécifiques. Découverte d’une culture d’exception lors d’un chantier de récolte, entre pays de Caux et Vexin.

Tout début septembre, la récolte du lin fibre bat son plein en Normandie. À elle seule, cette région cultive 50 % de la production mondiale. Les liniculteurs y produisent la fibre de cette plante depuis des années. Dans ce secteur à proximité des côtes de la Manche, le lin trouve toutes les conditions idéales pour assurer son développement végétatif, à savoir des terres fertiles, un climat tempéré avec une alternance de pluie et de soleil. Néanmoins, cette plante est exigeante et impose un bon niveau de technicité et de savoir-faire. Elle nécessite également du matériel souvent spécifique pour sa récolte. Ce sont d’ailleurs de drôles d’engins qui attirent mon attention lorsque je traverse la plaine entre pays de Caux et Vexin.

L’enrouleuse automotrice Depoortere et son unique roue directrice à l’avant présentent, outre une maniabilité hors pair, l’avantage de ne pas rouler sur les nappes de lin, comme l'enrouleuse traînée à timon hydraulique déporté.

Après le rouissage, l’enroulage

Ce ballet incessant de machines spécialisées attise ma curiosité au point d’aller à la rencontre de ce chantier d’exception. Dans la parcelle, une retourneuse automotrice et trois enrouleuses, l’une traînée par un tracteur et les deux autres automotrices, s’affairent. Ce chantier en est à la dernière des trois principales étapes de récolte : l’arrachage, le rouissage et l’enroulage. La première a lieu au début de l’été et s’opère au stade 2/3 de défoliation et de jaunissement afin de préserver la qualité et l’intégrité des fibres. Les plantes ne sont pas fauchées, mais les tiges sont tirées par des arracheuses spécifiques puis déposées à plat au sol en bandes parallèles, comparables à des andains, nommées « nappes ». La deuxième étape, le rouissage, est un phénomène naturel. L’alternance de pluie et de soleil favorise le travail des micro-organismes telluriques qui relâchent des enzymes dégradant les pectines, ce qui diminue la cohésion tissulaire et facilite par la suite le travail – à l’usine de teillage – de l’extraction de l’écorce filamenteuse. Pour homogénéiser cette action, la seule intervention humaine consiste à retourner la nappe à l’aide d’une retourneuse spécifique, une voire plusieurs fois, pour obtenir un rouissage uniforme sur toute sa profondeur. En conditions humides, une souleveuse peut également intervenir afin de favoriser le séchage de la nappe avant l’enroulage. Cependant, un compromis doit être trouvé puisque toute action mécanique est susceptible de dégrader la qualité de la fibre.

Le lin est retourné une voire plusieurs fois afin d’assurer le rouissage de toute l’épaisseur de la nappe ou de faciliter son séchage juste avant qu'il ne soit enroulé.

Trois grands types d’enrouleuses

La dernière et troisième étape consiste à enrouler le lin en balles rondes avant de le transporter à l’usine de teillage. Comme l’arrachage et le retournement, celle-ci nécessite du matériel spécial. Il en existe trois grandes variantes. La première est une presse à balles rondes classique sur laquelle différents équipements dédiés au lin fibre sont adaptés, à l’instar du déport hydraulique du timon d’attelage, du pick-up spécial lin, du liage électrique… Elle présente l’avantage d’être une solution économique autorisant l’utilisation de la presse lors de la saison de paille, par exemple. La deuxième variante est l’enrouleuse traînée réservée spécifiquement au lin, fabriquée par des spécialistes comme Depoortere, Dehondt ou encore Union. Elle se distingue par sa qualité d’enroulage supérieure et par sa robustesse accrue. Le liage plus rapide en fin de botte et le débrayage hydraulique du pick-up, tournant plus vite qu’une machine classique en faveur du débit de chantier, limitent en effet son usure. La troisième variante d’enrouleuse est l’automotrice, simple ou double. Plus coûteuse que les deux premières, elle se dote de trois roues, dont une directrice à l’avant lui conférant une grande maniabilité. Ainsi équipée, elle présente l’avantage de ne pas rouler sur la nappe. Elle ne dégrade donc pas la fibre et évite d’aplatir le lin au sol, ce qui limite, en cas de fraîcheur, la remontée d’humidité du sol. Elle se distingue également par la visibilité offerte en cabine sur la nappe de lin.

L’enrouleuse traînée, lorsqu’elle est dotée d’un timon à déport hydraulique, évite que le tracteur ne roule sur la nappe de lin fibre.
Le pick-up spécial lin reçoit des bandes transporteuses supérieures et inférieures alimentant la chambre de pressage.

Jusqu’à 20 km/h

L’enrouleuse automotrice, animée par un moteur Deutz AG développant 120 ch, évolue à une allure soutenue pouvant atteindre 20 km/h. L’avancement ainsi que tous les organes de la machine sont entraînés par un circuit hydraulique. Cette configuration autorise le réglage en continu de leur régime, à l’instar du pick-up. Ce dernier, doté de bandes caoutchouc transporteuses supérieures et inférieures, alimente l’ameneur puis la chambre de pressage, comparable à celle d’une presse à balles rondes classique. Tout au long du cycle d’enroulage, la machine déroule deux lignes de ficelle au sein de la chambre permettant, lors du teillage, de faciliter le déroulement de la nappe. Deux types de ficelles sont disponibles : synthétique ou à base de fibre de lin. En fin de botte, un signal en cabine retentit, et l’automotrice stoppe automatiquement sa course. Le liage final est mis en route avant d’éjecter la balle, laquelle est ensuite basculée sur son flanc. Tout ce processus est automatique, le chauffeur n’ayant plus qu’à donner une impulsion sur le joystick d’avancement pour reprendre un nouveau cycle d’enroulage. Lors de ce travail, il doit veiller à la bonne alimentation de la nappe sur le pick-up et au bon déroulage des ficelles dans la chambre. Il tourne dans la parcelle selon les passages préalablement réalisés par l’arracheuse et la retourneuse afin de toujours positionner la tête et la racine du lin dans le même sens au sein de la botte.

Deux cordons de ficelle se déroulent en continu dans la chambre de pressage lors de son remplissage. Cette opération facilite ensuite le déroulage de la balle lors de sa transformation dans l’usine de teillage.
Lorsque la chambre de pressage s’ouvre, la botte est éjectée puis basculée sur son flanc afin d'en faciliter, par la suite, le chargement sur un plateau.

Le lin fibre en France

- 100 000 ha environ cultivés chaque année.

- 1er producteur mondial.

- 85 % des exportations vers la Chine.

- Rendement moyen de 6 t de récolte/ha.

- 6 000 producteurs environ.

- 22 usines de teillage.

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