La herse étrille, d’abord plébiscitée en agriculture biologique, s’invite désormais dans les parcs de matériels d’agriculteurs travaillant en conventionnel. Elle s’intègre même dans les systèmes avancés tels que le semis direct et l’agriculture hybride. Nous nous sommes rendus à Ath, en Belgique, près de la frontière française, afin de découvrir l’impact de cet outil dans l’itinéraire technique de Johan Baland. Ce dernier, qui pratique le semis direct en agriculture conventionnelle, a récemment fait l’acquisition d’une herse étrille portée pour réduire son utilisation de produits phytosanitaires, dans un premier temps en désherbant mécaniquement ses cultures de blé, d’orge, de maïs, de soja et de féveroles, ainsi que ses prairies. Mais l’usage de cet outil a également fait apparaître d’autres avantages.


Un outil peu onéreux mais à gros débit de chantier
En 2024, Johan Baland souhaite investir dans un matériel de désherbage mécanique pour sa propre surface agricole utile (SAU) de 200 ha et pour celles d’agriculteurs voisins dans le cadre de prestations de travaux agricoles. « Je cherchais une solution peu onéreuse mais au débit de chantier élevé, car, dans nos conditions climatiques, les fenêtres d’intervention sont courtes, voire inexistantes certaines années. » Il choisit la herse étrille « Sarclerse », du constructeur français Carré. « J’ai opté pour le modèle de 12 m et son débit de chantier entre 6 et 10 ha/h, car la différence de tarif avec l’outil de 9 m était peu importante », explique-t-il. En effet, les deux reposent sur le même châssis avec un repliage en ciseaux. Le modèle de l’agriculteur est doté d’un système de pression au sol général (qui n’est donc pas indépendant pour chaque dent) afin de réduire encore son coût d’achat. Sa Sarclerse arbore 240 dents doubles, soit 480 doigts de 7 mm de diamètre, réparties sur six rangées.

Pas d’adaptation nécessaire du semis
Contrairement aux a priori associés à ce type d’outil, l’agriculteur explique ne pas faire face à des problèmes de déracinement des cultures, qu’elles soient en ligne ou en rang. Il a donc pu conserver son matériel de semis et son itinéraire technique, simplifié ou en semis direct selon la culture, ainsi que les écartements, la profondeur et la densité. « Il est tout de même important de réaliser une implantation de qualité pour une utilisation efficace de la herse étrille plus tard. Dans mon cas, le semoir Horsch Avatar SD de 9 m doté d’un écartement de 25 cm entre les éléments semeurs s’avère d’une grande efficacité. Lors des réglages de l’agressivité de la herse étrille, je peux me concentrer uniquement sur le déracinement des adventices, sans m’inquiéter », raconte Johan. Pour les cultures en rang comme le maïs, l’agriculteur n’hésite pas à retirer parfois les dents censées toucher le rang, et ce, d’autant plus qu’elles se démontent facilement grâce à une liaison par goupille avec le châssis. Il ne constate pas de chute de rendement malgré l’écrasement au niveau des passages de roues. « La herse étrille est attelée à un tracteur de 250 ch [l’agriculteur n’a pas de tracteur de puissance inférieure sur l’exploitation, ndlr] équipé d’une monte de pneumatiques en 800 mm de large à l’arrière, gonflés à 800 g pour limiter l’empreinte au sol. Je n’abîme pas plus les plants que lors d’un roulage. Au contraire, un passage tôt dans la saison favorise même le tallage », témoigne-t-il.

Des conditions réunies pour un travail optimal
Dans les céréales à paille, le désherbage avec la herse étrille commence dès le mois de février au stade du tallage et continue après celui du redressement. « Il faut toutefois cesser d’intervenir à ce moment dans les cultures comme l’orge, dont la tige est plus fragile que celle du blé », précise l’agriculteur. Pour le maïs, il intervient même directement après le semis en prélevée. Il attend ensuite le stade 3/4 feuilles pour désherber à nouveau, si nécessaire. Si ses sols aux limons battants (80 %), sablo-limoneux (25 %) et argileux (5 %) se prêtent bien au passage de cet outil, le céréalier n’imagine pas de sols réellement limitants si les conditions météorologiques sont optimales lors de l’intervention. Car c’est là le réel défi de l’utilisation de la herse étrille, selon Johan : trouver la bonne fenêtre et l’exploiter au maximum. Trop humide, et la herse marque le sol. Trop sec, et celle-ci ne désherbe simplement plus ou le contraint à réaliser deux passages. « Il faut être attentif lors d’une utilisation matinale, car l’humidité peut s’avérer trop élevée ; le gel encore présent risque également d’entraîner des dommages sur la culture. Il est nécessaire de prendre aussi en compte la météo après l’intervention, car les mauvaises herbes fraîchement déracinées doivent sécher en surface pour éviter leur repiquage naturel », souligne Johan. La limite de la machine se situe notamment en présence d’une quantité importante de débris végétaux, comme sur un blé de maïs où l’effet « râteau » empêche tout simplement son utilisation. « Une roto étrille pourrait être efficace, mais, de toute façon, je préfère conserver les résidus de maïs en surface pour couvrir le sol », conclut-il.
Des qualités agronomiques
En plus du désherbage, l’agriculteur constate des avantages insoupçonnés à l’utilisation de sa herse étrille. Étant en semis direct depuis quelques années, il a pu observer l’apparition de mousses en surface, que l’outil détruit sur son passage. Celui-ci brise également les pailles laissées en surface par la culture précédente, accélérant ainsi leur décomposition. Enfin, les mulots et limaces, dont il note la multiplication dans ses sols non travaillés, sont dérangés par les passages de l’outil. Johan intervient aussi chez certains clients pour casser la croûte de battance : un réglage agressif de sa herse lui permet de faire d’une pierre deux coups. In fine, l’agriculteur belge a très peu modifié sa manière de travailler. L’outil possède en plus de multiples avantages pour son système cultural, à condition que la météo lui offre les bonnes fenêtres.


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