Voici les résultats complets de notre essai comparatif des sept épandeurs à fumier organisé par Matériel Agricole, avec l’aide des chambres d’agriculture du centre et du sud-ouest de la France. Vous trouverez comment nous avons déterminé la largeur de recroisement entre deux passages et un tableau présentant certaines données mesurées.
Les effluents d’élevage, de type lisier, fumier de bovins ou compost, bénéficient de valeurs fertilisantes non négligeables. Ils constituent un apport en azote, phosphore et potassium (NPK) directement disponible sur les exploitations d’élevage et de polyculture. Pour apporter une dose homogène de fumure organique sur toute la surface de la parcelle, quelques bonnes pratiques doivent être respectées. Même si les épandeurs de fumier sont équipés de boîtiers de pesée, un chargement avec un dôme uniforme sur toute la longueur de la caisse diminue les mauvaises surprises.
Mesures effectuées au travail
Volume donné (m³)
Volume de caisse mesuré (m³)
Tonnage chargé/épandeur (kg)
Largeur épandage (m)
Thiévin
18
15,3
5000
20
Tebbe
14
12,3
3100
26
Perard
19
14,1
3800
24
Leboulch
17
13,3
4400
22
Joskin
16
13,4
3100
22
Gyrax
15,5
12,6
3100
22
Chevance
15
11,6
6000
16
Il est également important de connaître la densité du produit, la largeur d’épandage et la largeur de travail. La première se détermine en pesant un seau, dont le volume est connu, rempli du produit à épandre. La deuxième nécessite simplement de mesurer la largeur de la nappe apportée lors du premier passage. Quant à la dernière, pour être performant, il faut la calculer. Dans le cas contraire, il faut l’estimer à l’œil selon la nappe au sol.
Cette bâche a permis de collecter des échantillons qui ont été pesés afin de déterminer la largeur d’épandage puis de calculer la largeur de travail et le recroisement optimal.
DES VARIATIONS IMPORTANTES
Grâce aux relevés réalisés dans la parcelle sur la bâche de 26 m de large, nous avons déterminé les courbes de répartition transversale. En découlent les coefficients de variation (CV). Ces derniers évoluent selon la distance de recroisement entre deux passages, allant de 4 à 12 m dans le cas du compost épandu lors de notre essai. Un CV en dessous de 20 %témoigne de la bonne régularité d’épandage sur toute la largeur.
Le réglage de la trappe permet de modifier le point de chute de la matière sur les disques de la table, déterminant ainsi la distance et la forme de la courbe.
En voici les résultats ci-dessous. Attention, ces derniers sont le fruit des mesures réalisées avec un compost léger et sec, dont la masse volumique ne dépasse pas les 250 kg/m3. Un produit plus atypique, à l’image d’un fumier de bovins humide, formera une nappe complètement différente et probablement plus homogène. Une chose est sûre, les caractéristiques techniques des matériels essayés dans ce comparatif ainsi que le mode opératoire mis en place (vitesse d’avancement, vitesse du tapis, données entrées dans les boîtiers…) ont un impact sur la qualité des résultats. La distance parcourue pour vider la caisse de l’épandeur, pouvant doubler d’une marque à l’autre lors de nos essais, modifie de manière importante le débit instantané. Il en résulte une nappe d’épandage plus ou moins épaisse et significative pour le recroisement des passages.
Bien que la largeur de projection de l'épandeur Thievin atteigne 20 m, le compost est davantage éjecté à l’arrière de la machine sur une largeur de 10 m. L’évolution du CV se rapproche timidement de la limite satisfaisante des 20 % lorsque les recroisements entre deux passages atteignent les 8 m (CV de 23,8 %). Cette distance semble la plus intéressante, alliant débit de chantier et couverture du terrain par le produit. Si l’utilisateur veut prioriser la qualité de répartition transversale, il devra se rabattre sur un recroisement tous les 4 m. À cet intervalle, le CV diminue significativement jusqu’à 5,2 %, l’un des meilleurs de cet essai.
Dans ce comparatif, le coefficient de variation de l'épandeur Tebbe est le seul à ne jamais dépasser la barre des 20 %. Le MS 140 peut donc tout à fait espacer ses va-et-vient de 12 m. Son CV est alors de 15 %. Il s’améliore jusqu’à 5 % en réduisant la largeur de travail à 6 m. C’est d’ailleurs avec cet intervalle que la dose des 20 t/ha peut être respectée. La nappe d’épandage du MS 140 forme quasiment un dôme avec un léger creux au centre. Il semblerait que la conception particulière de cet épandeur autorise un point de chute de la matière au centre des plateaux de la table, formant ainsi une nappe régulière. Ceci a également permis au Tebbe d’atteindre la plus grande largeur d’épandage, soit 26 m.
L'épandeur Pérard a décrit une courbe de répartition transversale presque parfaitement pyramidale. Ceci lui permet d’obtenir un CV contenu en dessous des 20 % jusqu’à 8 m de recroisement. En optant pour cette dernière stratégie, la quantité totale épandue serait théoriquement limitée à un peu plus de 10 t/ha. En réduisant la vitesse d’avancement en conséquence, l’Optium obtiendrait l’un des meilleurs résultats de ce test. Au-delà de 8 m de largeur de travail, son CV franchit rapidement la barre des 22 %, le plaçant en dehors de la zone de tolérance. Cet épandeur comporte un déflecteur, qui n’était pas en service lors de nos mesures, visant à araser le pic au centre de la courbe.
Malgré une largeur d’épandage de 22 m, la courbe de répartition transversale du Goliath présente un creux au centre, pénalisant l’homogénéité de sa nappe. Ceci explique pourquoi les passages devraient être espacés de 6 m afin de maintenir le CV en dessous de la barre des 20 %. Les passages à 5 et 7 m peuvent aussi s’envisager, puisque le CV, respectivement de 20,9 et 21,1 %, franchit tout juste la limite. Il n’est pas utile de resserrer davantage les trajets puisque, à 4 m d’intervalle, le CV s'avère élevé (23,6 %), et le débit de chantier s’en trouverait fortement pénalisé. La consigne des 20 t/ha est toutefois respectée, même à 6 m.
Lors de notre essai, l’épandeur Joskin ne bénéficiait pas de système de pesée. Et il en a souffert. Son conducteur a dû estimer la densité du produit à épandre, ce qui s’est avéré particulièrement difficile au vu de la volatilité de ce compost. La quantité de matière récupérée sur la bâche était si faible que les variations se sont révélées très grandes. C’est donc sans surprise que le CV du Tornado s’envole à plus de 20 % dès que la larguer de travail dépasse 5 m. En dessous, il obtient un CV de 12 %. Si sa courbe se montre relativement plate, elle comporte néanmoins deux pics, aux environs des 4 m de chaque côté de l’axe de la caisse.
Le coefficient de variation de l'épandeur Gyrax se montre particulièrement constant avec peu d'oscillations. Il franchit le seuil des 20 % à 7 m de largeur de travail (CV de 20,7 %) et à 12 m (CV de 21,1 %). Le EPLX 155 saura donc s’adapter à toutes les distances de recroisement. Sa courbe de répartition transversale présente une zone centrale de 10 m de large relativement constante, malgré un certain déséquilibre entre droite et gauche (54 %/46 %). Avec un recroisement des passages tous les 10 m, l'épandeur n’atteint pas la consigne des 20 t/ha. Sa vitesse d’avancement dans la parcelle aurait dû être réduite pour y parvenir.
La forme de la courbe du coefficient de variation de l’épandeur Chevance s’explique par sa nappe d’épandage formant un « M ». Le recroisement des passages tous les 4 m semble être le meilleur compromis, quoique cet intervalle offre un débit de chantier faible. Un recroisement tous les 8 m, bien que le CV soit, dans ce cas, légèrement supérieur aux 20 % tolérés, offre un bon ratio entre qualité d’épandage et rapidité d’exécution. Au-delà de 9 m, la couverture totale de la surface de la parcelle ne sera pas respectée. Notons que cet épandeur, contrairement aux autres protagonistes de ce test, recevait des hérissons verticaux.
Nota Bene : QU’EST-CE QUE LE COEFFICIENT DE VARIATION ?
Le coefficient de variation (CV) est le rapport de l'écart-type à la moyenne. Il donne une idée sur la fiabilité et la constance de l’épandage. Plus la valeur du coefficient de variation est faible, plus l'estimation est précise.