Machinisme de demain, un défi humain ! Le robot Kuhn Aura 100 % autonome du silo à l'auge
Nicolas et Anthony Maillard travaillent en Gaec avec deux salariés sur 250 ha de surface agricole utile en technique conventionnelle, à Saint-Bômer-les-Forges, dans l’Orne. Les deux frères possèdent un élevage de 550 têtes, réparties en deux ateliers, l'un laitier et l'autre dédié à l'engraissement de taurillons. Depuis janvier 2022, ils utilisent le Kuhn Aura, un robot autonome dans ses déplacements capable de désiler, de mélanger et de distribuer les différentes rations à l’auge.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
« Grâce au robot d’alimentation Kuhn Aura, nous avons dégagé entre une heure et demie et deux heures par jour pour nous concentrer sur d’autres activités au champ ou pour gérer notre méthaniseur », annonce Nicolas Maillard, éleveur associé avec son frère Anthony au sein du Gaec du même nom, en Normandie. Après le renouvellement de deux robots de traite en 2015 puis le montage d’une unité de méthanisation en 2017, les deux frères ont engagé une réflexion pour automatiser le poste alimentation des animaux. Sur leur exploitation de 250 ha de surface agricole utile, ils produisent du lait et de la viande, aidés de deux salariés. Le premier atelier compte 110 vaches laitières de race prim’Holstein ainsi qu'un troupeau allaitant et sa suite en engraissement, totalisant 550 bêtes. « Quand nous avons eu écho de la solution autonome en développement chez Kuhn, nous avons choisi d’attendre et, fin 2020, nous sommes allés voir le prototype de l’Aura en fonctionnement en Vendée », précise Anthony Maillard. Conquis par ce dernier et motivés par la marque française, les deux éleveurs ont décidé d’investir dans une des préséries du robot. Arrivé sur la ferme en janvier 2022, l’Aura comptabilise déjà plus de 7 200 heures de travail.
Peu d’aménagements nécessaires
« Cela faisait longtemps que nous cherchions à automatiser le poste alimentation, mais les autres marques proposaient uniquement des cuisines rassemblant tous les aliments des rations, raconte Anthony Maillard. Ces solutions nécessitent une plus grosse infrastructure, avec un système de grappin ou de tapis pour charger le robot d’alimentation. » Auparavant propriétaires d’une mélangeuse Kuhn Euromix de 12 m3 avec une fraise de désilage à l’arrière, les exploitants tenaient à conserver un système qui s’alimente directement aux différents silos couloirs et cellules. Autre problématique de la ferme : des pentes importantes que la majorité des autres robots du marché ne peut supporter. « Il aurait alors fallu créer des rampes d’accès en béton pour qu'ils puissent évoluer sur notre ferme », note Nicolas Maillard. L’Aura, lui, possède quatre roues motrices et directrices, ainsi que des pneus anticrevaison. Il peut évoluer sur toutes les surfaces, avec des pentes allant, selon le constructeur, jusqu’à 20 %. Le robot atteint une vitesse maximum de 7 km/h et ralentit sur certaines zones définies tels des croisements.
Le seul aménagement supplémentaire réside dans l’installation d’un réseau wi-fi propre à la ferme. Avant la mise en route, une équipe de Kuhn effectue un tour de l'exploitation pour vérifier la compatibilité d'un tel équipement. Les techniciens de la marque alsacienne s’appuient sur les données d’un géomètre. Celui-ci scanne l'intérieur des bâtiments et la cour afin de vérifier que l’Aura est en mesure de se déplacer sans contrainte sur la ferme. « À sa livraison, la machine connaît ainsi toutes les données topographiques et géographiques des installations de l’exploitation », indique Anthony Maillard. Le Gaec Maillard ayant acquis un modèle Aura en présérie, le service du bureau d’études de la marque a suivi de près l’élevage pour faire évoluer le robot. « La machine en tant que telle a toujours bien fonctionné avec, d’emblée, des rations au kilogramme près, explique Nicolas Maillard. Les évolutions ont davantage concerné les alarmes et les sécurités. »
Un protocole précis
Pour s'orienter à l’extérieur et suivre les chemins établis par le constructeur Kuhn, l’Aura s’appuie sur un guidage GPS avec correction RTK. Dans les bâtiments, la machine autonome utilise le Lidar, un système de guidage laser, ainsi que l’odométrie, un ensemble de capteurs embarqués permettant de mesurer le déplacement. La machine, d’un gabarit de 2,5 m de hauteur sur 1,9 m de largeur et 6,9 m de longueur, présente une capacité de cuve à double vis de 3 m3. Elle se meut à l'aide d’un moteur thermique de 57 ch. Sa consommation, de 3,5 à 4 L/h, autorise quatre jours de fonctionnement, sans ravitaillement. Pour lancer une ration, l’Aura se poste sous les vis afin de recevoir l’aliment, en pesant les farines et tourteaux, ou en respectant un temps de vidange donné pour les minéraux.
Le robot se dirige ensuite vers les silos d'herbe ou de maïs ensilage pour poursuivre l’élaboration de la ration. La mélangeuse automotrice bénéficie d’une fraise de 60 cm de large, montée sur un translateur. Ce module de chargement lui permet d’effectuer trois descentes dans le tas, à droite, au milieu et à gauche, et de s’approcher au maximum du mur des silos. Avant de désiler, l'Aura enlève la protection de la fraise, baisse le convoyeur et scanne la hauteur du tas à l’aide de capteurs infrarouges. À chaque cycle, il est capable de reprendre précisément sa dernière position et ainsi de laisser un front d’attaque du silo parfaitement lisse.
Le protocole pousse même la précision du désilage avec une repasse de la fraise au sol pour récupérer la matière tombée. « Nous pouvons régler une profondeur de passe différente pour le maïs et pour l'herbe, en général 20 cm pour le premier, moins fibreux, et entre 12 et 15 cm pour la seconde », explique Nicolas Maillard. Pour le déchargement à l’auge, l’utilisateur sélectionne le bâtiment et le lot à alimenter grâce au logiciel Aura sur l’ordinateur de l’exploitation ou directement depuis un smartphone (voir notre encadré).
Un gain de temps et de production
« Nous gagnons énormément de temps, particulièrement les week-ends. Auparavant, nous devions désiler une double ration le samedi pour nous libérer le dimanche, ce qui nous prenait une matinée entière. Cette tâche nous pénalisait également lors des chantiers comme la récolte de l’ensilage », notent les deux frères. En plus du temps dégagé, les rations chauffent moins en semaine comme le week-end. Avant l’Aura, un salarié à mi-temps désilait tous les matins de la semaine pendant deux heures. Désormais, la partie alimentation ne nécessite plus que vingt minutes. Les silos doivent être débâchés, le front d’attaque bien nettoyé pour éviter les mises en sécurité, les compartiments de paille et de foin toujours fournis, et la machine dépoussiérée au niveau des capteurs.
« Les vaches sont distribuées six fois dans la journée, les taurillons trois fois, et les génisses deux fois. Cela permet d’avoir toujours de la ration fraîche et donc moins de refus, surtout le week-end », estime Nicolas Maillard. Les éleveurs ont observé une hausse de la productivité de lait à la mise en route du robot. « Nous avons 75 places au cornadis pour 110 vaches, il y avait donc de la concurrence à l’auge. Avec l’Aura, la fréquentation au robot est mieux répartie sur la journée », se félicite l’exploitant. La mélangeuse automotrice autonome fonctionne moins de 12 heures par jour pour l’ensemble du troupeau.
Le robot s’intègre en sécurité dans l’exploitation
L’installation d’une mélangeuse automotrice autonome sur une exploitation nécessite un audit de sécurité pour valider la faisabilité du projet. « La hauteur des murs des silos de stockage, par exemple, doit être au minimum de 1,8 m, ce qui était déjà notre cas », explique Anthony Maillard. Il faut également mettre en place une signalétique sur la ferme, tels des panneaux, prévenant de la présence d’une machine autonome. L’Aura est bardé de capteurs pour détecter une personne à distance et s’arrêter automatiquement dès que celle-ci est trop près. Il s'agit de capteurs à ultrasons et laser, et, en dernier recours, de bordures sensibles placées tout autour de l’appareil et sur la protection de la fraise, à l’avant.
De même, si une personne entre dans le périmètre défini alors que la fraise est en marche, l'outil s’arrête et se met en sécurité. Dans les deux cas, un réarmement manuel de la machine est nécessaire pour la reprise de sa mission. « Le jour de l'ensilage ou quand l’entreprise d’épandage de fumier passe, on ne l’arrête même pas. Tout le monde le laisse travailler. Aujourd'hui, il fait vraiment partie de l'environnement de la ferme », apprécie l’éleveur.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :