En 2021, Philippe Briand et Alexandre Delamarre, les deux associés de l’ETA Briand Delamarre, se sont équipés pour semer, biner et récolter du maïs avec un interrang de 50 cm. En réduisant la largeur par rapport au standard de 75 cm, les feuilles couvrent généralement le sol avec huit jours d’avance.
« C’est au mois de juin que l’avantage se mesure, explique Philippe Briand. Si le temps est sec et que la culture végète un peu, il arrive que le maïs semé à 50 cm ait déjà recouvert toute la surface, alors que dans les parcelles semées à 75 cm, la jonction n’est pas encore faite. Dans le premier cas, la végétation empêche la lumière d’arriver au sol et les mauvaises herbes ont plus de mal à se développer. Dans le second cas, les adventices continuent de croître, et un passage supplémentaire de désherbage mécanique ou chimique est parfois nécessaire. »

Changement d’écartements en moins de 10 minutes
Pour l’implantation, les deux associés ont choisi un semoir Kuhn Maxima, un modèle à entraînement électrique avec une rangée d’enfouisseurs pour l’apport de fertilisant en localisé. L’outil est attelé derrière un Fendt 720 Vario avec une trémie d’engrais à l’avant. Une interface, placée entre le tracteur et le semoir, comporte des dents pour effacer le tassement dû aux roues. Cela évite les levées précoces d’adventices derrière les traces du tracteur. La largeur entre rangs s’ajuste hydrauliquement. Un système de barres perforées dans lesquelles sont placées des butées sert à ajuster l’écartement entre 37,5 et 80 cm.

« En version 50 cm, le semoir compte neuf rangs au total, soit une largeur de travail de 4,5 m, précise Alexandre Delamarre. Nous l’utilisons aussi en version standard à 75 cm en gardant huit éléments et en relevant le neuvième. Le changement s’opère en moins de dix minutes : c’est très rapide et sans contrainte pour le chauffeur. Ce semoir reste donc polyvalent et n’est pas figé à 50 cm. Nous l’avons déjà employé pour implanter du maïs ensilage à 37,5 cm, du colza, du lupin et de la betterave fourragère. »


Une bineuse modifiée
Pour le désherbage, l’ETA propose des interventions 100 % mécaniques avec roto-étrille et bineuse, ou une solution mixte avec un traitement phytosanitaire. Les associés ont investi dans une bineuse de marque Carré de 12 rangs espacés de 45 cm qu’ils ont transformée en un modèle de 9 rangs à 50 cm. Cette machine est attelée derrière un autre tracteur Fendt dont la voie a été ramenée à 1,5 m. Ainsi, le tracteur peut aussi tirer une autre bineuse équipée en 75 cm. L'ensemble n’est donc pas bloqué uniquement sur le binage à 50 cm. Mais avec une voie aussi réduite, les chauffeurs doivent redoubler de prudence dans les chemins et les entrées de champ pour éviter de se renverser.

« Cette année, nous avons complété l’équipement avec une interface hydraulique pour la bineuse comprenant un pilotage par caméra, ajoute Philippe Briand. L’objectif est de gagner en précision tout en augmentant la vitesse de travail. L’an passé, pour le binage à 50 cm, nous avons vu qu’il était difficile d’avancer à plus de 3 km/h. La caméra et l’interface facilitent la tâche du chauffeur qui travaille désormais à vitesse normale, entre 5 et 6 km/h sans risque d’abîmer la culture. »


Cueilleur de 12 rangs
Pour compléter la démarche, les associés ont également acheté en 2021 un cueilleur à maïs Geringhoff de 12 rangs avec un écartement de 50 cm. Ce matériel est équipé sur chaque rang d’un broyeur et de deux chaînes d’entraînement. Un équipement haut de gamme, acheté 110 000 €, qui laisse une parcelle propre après récolte. Ce dernier peut aussi servir à battre du maïs semé à 75 cm sans difficulté, alors qu’avec un cueilleur à 75 cm il est plus compliqué de récolter du maïs implanté à 50 cm. Sur les deux premières saisons, cette nouvelle technique a déjà séduit une dizaine de clients pour un total de 350 ha/an. Comparée à un semis à 75 cm, l’implantation à 50 cm est facturée 10 €/ha supplémentaire. Cette majoration se justifie par un débit moindre puisque le semoir, malgré ses neuf rangs, ne couvre que 4,5 m par passage, alors qu’en écartement standard la largeur de travail est de 6 m. Une différence qui impacte le débit de chantier et augmente aussi l’usure des éléments.
« Changer de pratique représente un investissement pour nous comme pour le client, mais nous croyons qu’à terme cela se révélera payant, conclut Alexandre Delamarre. Notre secteur compte plusieurs zones de captage d’eau potable où les agriculteurs sont incités à réduire l‘usage des phytosanitaires. Le semis à 50 cm combiné au désherbage mécanique est une solution pour y parvenir. De plus, selon les préconisations des semenciers, un écart réduit à 50 cm permet d’augmenter la densité de 15 à 20 %, et de gagner jusqu’à 2 t/ha de matière sèche à la récolte. L'un de nos clients teste cela cette année, et nous attendons les résultats pour mesurer les gains potentiels. »