À son lancement en 1995, la gamme Agrotron de Deutz-Fahr se démarque par le design « futuriste » que lui confèrent ses lignes arrondies et son capot « très » plongeant, en rupture totale avec les tracteurs de l’époque. Disponible de 80 à 150 ch, cette série est devenue une véritable légende en raison de ses innovations importantes, tant sur le plan du confort qu'en matière de performance. Aymeric Patté est l’heureux propriétaire d’un Agrotron 135 de deuxième génération (mk2). Il exploite une SAU de 50 ha en maraîchage et en grandes cultures, une surface réservée pour près d’un quart à la production d’endives. La ferme, située à Croix-Moligneaux, dans la Somme, compte 9 tracteurs, dont 7 Deutz-Fahr, le plus ancien étant un D4006, et le plus récent un Agrotron 6165 TTV. Arrivé sur l’exploitation en 2011, l’Agrotron 135 est devenu tout de suite le tracteur de tête, utilisé majoritairement aux travaux de semis, avec un semoir Nodet Gougis de 3 m, et pour les chantiers de travail du sol.

Depuis cinq ans, le youngtimer a été converti en tracteur à tout faire. « Il ne me coûte rien et dépanne bien en cas de besoin, explique Aymeric Patté. Mon entourage m’a aussi recommandé de le garder, car c’est une vraie référence. » L’Agrotron de première génération voit le jour à la période où le tractoriste bavarois est racheté par l’Italien Same. Le groupe Same Deutz-Fahr que nous connaissons actuellement est alors constitué. Bon nombre des innovations de cette série profiteront au reste du groupe.

Un 6-cylindres de 7,1 L
L'Agrotron 135 mk2 est animé par un six-cylindres de 7,1 L de cylindrée maison, à l’époque où Deutz AG appartenait au groupe KHD (Klöckner_Humboldt-Deutz). Ce moteur turbocompressé développe 135 ch au régime nominal et 139 ch de puissance maximale sur ce modèle. Sa particularité ? Son système d’injection haute pression, jusqu’à 1 400 bar, composé de pompes individuelles, plus communément appelées « injecteurs-pompes », entraînées par l’arbre à cames. Le tractoriste met en avant une plage de puissance constante impressionnante de 1 800 à 2 300 tr/min, ainsi qu’une plage de couple constant s’échelonnant de 1 380 à 1 725 tr/min.



Côté hydraulique, le modèle d’Aymeric Patté dispose de quatre distributeurs à commande mécanique. L’un d’eux est repris de l’arrière pour gérer le relevage avant. La pompe hydraulique débite 83 L/min, et la quantité d’huile exportable atteint 40 L. Chaque levier hydraulique dispose d’une position flottante sur l’avant et d’un verrouillage mécanique, via un cran de blocage situé sur le dessus, afin de sécuriser les fonctions hydrauliques. En option, le constructeur proposait un levier en croix pour piloter les deux premiers distributeurs.

Malgré son âge, l’Agrotron 135 convainc toujours. Habituellement, lors de la récolte des endives avec l’automotrice Pouchain, le 6165 TTV et le M625 de la ferme emportent respectivement une benne Brimont de 14 t et une Maupu de 16 t. « Mes employés préfèrent conduire l’Agrotron plutôt que le M625, raconte Aymeric Patté. Il est plus facile à prendre en main malgré ses 12 ans de plus. » La récolte a lieu au mois de novembre, dans des conditions souvent humides. « Nous avons des parcelles présentant de forts dévers et des zones de marais. Nous évitons alors certaines zones avec le 6165 TTV pour ne pas se planter, témoigne le Samarien. L’Agrotron, lui, sort les remorques sans peiner et sans aucune masse additionnelle. » Sa cylindrée plus importante, couplée à la transmission semi-powershift, lui donne en effet plus d’aisance, bien que sa puissance soit inférieure à celle de son grand frère à variation continue. « J’ai beaucoup entendu dire que son poids réduit le pénalisait aux travaux de traction, indique l’exploitant. Mais, de mon point de vue, en matière d'adhérence, il n'a pas à rougir, bien au contraire. »
Transmission ZF efficace
L’Agrotron 135 mk2 est doté d’une transmission d’origine ZF avec une semi-powershift à six vitesses mécaniques synchronisées et quatre rapports sous charge. Ces derniers – baptisés, du plus petit au plus grand, « L », « M », « H » et « S » – sont rappelés sur un petit écran intégré dans le montant droit. La transmission bénéficie du « Speedmatching » permettant d’adapter le rapport sous charge à la vitesse et à la charge lors des passages de gamme. En France, la transmission était à l’origine bridée à cinq gammes pour limiter la vitesse en dessous de 40 km/h. Ainsi, sur le pommeau, les vitesses sont notées de 1 à 5. En réalité, la sixième était bien disponible après déblocage par le concessionnaire, permettant ainsi au youngtimer d’évoluer à près de 45 km/h. L’inversion du sens de marche se gère au volant par une petite palette rouge, couleur qui rappelle les fonctions liées à la transmission. Cet inverseur, dit « à présélection », autorise le changement de direction avant la manœuvre : ce dernier prend donc effet seulement après avoir actionné et validé l’opération par appui sur la pédale d’embrayage. « C’est un coup à prendre, mais, une fois que c'est intégré, cela s'avère très efficace au champ », apprécie Aymeric Patté.
Le confort est de mise
En cabine, le capot plongeant et l’importante surface vitrée de 6,5 m2 apportent une très bonne visibilité sur l’avant. Sous la fenêtre arrière, une seconde vitre permet au conducteur de jeter un œil sur le relevage arrière. Ce dernier se commande depuis un curseur gradué placé sur la console de droite. La butée haute, la vitesse de descente et le contrôle d’effort du relevage sont disposés sur cette même console. Sur la génération suivante d’Agrotron (mk3), la commande principale se verra relocalisée sur l’accoudoir droit, à côté d’un joystick servant à descendre et à monter les powershift. À sa sortie, Deutz-Fahr mettait en avant la cabine spacieuse, la grande visibilité à 360° grâce à des montants étroits et un niveau sonore record de 72 dB(A). « Malgré son âge, il reste très confortable avec son pont avant suspendu et son siège à suspension pneumatique », note l’exploitant. Le système est composé de deux vérins hydrauliques reliés à deux boules d’azote. Le contrôle s'opère via un capteur de position et un boîtier électronique. Le système de suspension peut être activé ou désactivé par un bouton depuis la cabine.


L’Agrotron 135 dispose de quatre régimes de prise de force : 540, 540E, 1 000 et 1 000E tr/min. Les codes couleur, encore présents aujourd’hui, facilitent la prise en main du tracteur : vert pour le relevage, bleu pour l’hydraulique, orange/rouge pour la transmission et jaune/orange pour la prise de force. Citons enfin des détails soignés comme les deux rétroviseurs intérieurs dans le plafonnier, au niveau des montants de cabine, ou l'affichage clair du petit écran digital intégré au tableau de bord. Simple mais doté d'un bon équipement, l'Agrotron 135 mk2 est un tracteur qui vieillit bien dans le temps pour réaliser un large panel de travaux sur l’exploitation d'Aymeric Patté.