« Nous avons décidé de choisir une salle de traite conventionnelle, et ça nous convient parfaitement. Le robot n’a pas sa place dans notre exploitation, parce que nos bêtes ne pourraient plus sortir en pâture. Mais hors de question de les laisser en stabulation, ou alors je ne fais plus ce métier-là ! », lance l’éleveuse Aurore Le Penven, la quarantaine, associée du Gaec des II Versants avec son mari Emmanuel.

Depuis 2004, son époux, Emmanuel, et Aurore Le Penven exploitent un troupeau de 115 vaches laitières à Saint-Maurice-du-Désert (Orne), dans le bocage normand. Nicolas Le Penven, leur salarié à temps plein, et des travailleurs occasionnels leur prêtent main-forte. Chacun est capable de relayer l’autre mais conserve naturellement son domaine de prédilection. L’éleveuse assure ainsi la traite, l’insémination, les soins aux veaux et la comptabilité en binôme avec son mari. Emmanuel Le Penven et le salarié se partagent quant à eux l’alimentation du troupeau, l'entretien des aires paillées et les travaux des cultures. Dans un relief vallonné, les 160 ha de surface agricole utile de cette exploitation de polyculture-élevage sont répartis sur deux sites distants de 6 km.
« Grâce à nos terres très portantes, les vaches sortent au pré, après la traite, de début mars jusqu’à la fin de l’automne », précise l’exploitante.
Au siège, la forêt ceinture les bâtiments d’élevage. Par conséquent, les parcelles les plus éloignées des 25 ha de pâture accessibles aux vaches se trouvent à près de 1 km de distance.
« Nous sortons le troupeau par conviction personnelle, bien que ce soit bien plus compliqué et plus exigeant que de laisser nos vaches à l’auge toute l’année. Elles consomment une ration diversifiée et ruminent. Elles sont en bonne santé. Le vétérinaire travaille avec nous en préventif. Et comme elles ont l’habitude de marcher, le pareur ne vient pas chez nous ! »

La vitesse élevée à laquelle les productrices sortent de la salle TPA contraste avec la situation connue avant la rénovation.
Traite deux fois plus rapide
La salle de traite par l’arrière (TPA) DeLaval Champion 2 x 10 postes est installée dans un nouveau bâtiment, non loin de l’aire paillée. Mise en route en septembre par le concessionnaire normand Bouet Service Élevage, elle représente un bond en avant pour ces éleveurs.
« Aujourd’hui, c’est que du bonheur ! Même si traire reste du travail à la chaîne, plus besoin de faire sortir les vaches une par une de la salle de traite… Et physiquement, je ne souffre plus ! »
Le nouveau système dénote en effet par rapport à l’ancienne installation en épi Manus 2 x 6 postes, avec son étroite fosse de traite autoconstruite dans les bâtiments historiques et dont les décrochages n’ont jamais fonctionné ! Quand Aurore Le Penven trait seule, l’opération prend deux bonnes heures le matin et une heure et demie le soir, soit près de deux fois plus vite qu’avec l’ancienne installation. À deux, l’opération est encore plus rapide, avec en sus des soins aux veaux simultanés. Le nettoyage de l’installation prend, lui, environ 20 minutes.
« Nous sommes réglés avec la traite. Celle-ci commence à 6 h du matin, puis à 16 h. Cette organisation nous correspond bien, car, une fois que c’est fini, je pense à autre chose qu’aux vaches ! »
Et pour cause : le couple élève ses cinq enfants âgés de 4 à 16 ans. Parallèlement, Emmanuel est délégué au sein de la coopérative laitière Agrial, qui collecte le lait de la ferme. Aurore, quant à elle, cumule deux mandats au Groupement de défense sanitaire (GDS) de l’Orne et à la Mutualité sociale agricole (MSA) au niveau cantonal.
168 000 € d’investissement
Lors du choix de leur système de traite, le couple d’éleveurs a considéré toutes les solutions possibles. Le critère de qualité du lait n’a pas pesé dans la décision, le niveau cellulaire de leur troupeau plafonnant déjà à 110 000 cellules/mL toute l’année. Leur principal objectif était de traire plus rapidement. La proximité du concessionnaire de la marque DeLaval a joué en faveur de celle-ci. Les époux Le Penven apprécient en premier lieu la tranquillité d’esprit que procure un système de traite conventionnel.
« Nous n’avons étudié que très brièvement la solution du robot, se souvient Aurore Le Penven. Des amis ayant franchi le pas ne reviendraient pour rien au monde en arrière. Nos voisins se sont eux aussi équipés d’un automate avant de réinstaller une salle de traite. Le robot est une machine merveilleuse, mais ce n’est pas pour moi. Je me sentirais inutile et il serait nécessaire de conditionner les vaches. J’ai besoin que les vaches me passent entre les mains ! »
Quant à la salle de traite rotative, les associés sont bien allés en voir une avant de se prononcer, mais « ce n’est vraiment pas le même coût ni la même cadence, et le trayeur reste statique », résume l’éleveuse, peu emballée. Une formation dispensée par Elvup, l’organisme ornais de conseil en élevage, les confortera dans leur choix. Le coût de cette TPA toutes options s’élève à 168 000 €. Ce montant comprend notamment le logiciel de gestion de troupeau Delpro, la porte de tri, le chien mécanique, le dispositif évaluant la conductivité du lait, le monitoring de l’activité et les manchons de traite Evanza. En revanche, il n’intègre pas le nouveau bâtiment qui abrite l’installation.
« Nous sommes sur le point de mettre en place un plancher mobile pour traire plus confortablement. Par ailleurs, la maçonnerie de la TPA a été prévue pour 2 x 15 places. Lors d’un éventuel futur agrandissement, il suffira de sceller sur le béton deux modules supplémentaires de cinq emplacements. »
Les associés ont choisi d’amortir l’investissement sur 20 ans. En modernisant leur exploitation, ils ont bénéficié d’une subvention PCAE* d’environ 25 % du coût.
« Toutes les solutions de traite sont respectables, conclut Aurore Le Penven. Mais un système ne fonctionne que s’il convient à la personne qui l’utilise. Et celui-là me ressemble vraiment ! »
* PCAE : Plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles.
REPÈRES
- 2 associés.
- 1 salarié.
- 1 vacher vacataire du service de remplacement, intervenant 2 jours par mois lors de congés maladie ou de formation des associés.
- 115 vaches.
~ Niveau de production : 8 400 kg par vache.
~ Taux protéique (TP) à la dernière livraison : 34,8 g/kg.
~ Taux butyreux (TB) à la dernière livraison : 42,8 g/kg.
~ 30 jeunes bovins engraissés par an.
~ 160 ha de surface agricole utile.
~ Un atelier grandes cultures comprenant 80 ha de céréales et le maïs-ensilage.
Voir un autre article sur ce sujet : La traite traditionnelle pour rester au contact du troupeau