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Comparatif versoirs de charrueQuel impact des versoirs de charrue sur la consommation du tracteur au labour ?

Afin de réaliser un comparatif, Lemken France a mis a disposition deux charrues Juwel 8 MVU que seuls les versoirs permettent de distinguer.
Afin de réaliser un comparatif, Lemken France a mis a disposition deux charrues Juwel 8 MVU que seuls les versoirs permettent de distinguer. (©J.H.)

Dans un contexte où le coût du carburant est en hausse, certains agriculteurs pratiquant le labour disent avoir réduit la consommation de leur tracteur en utilisant des charrues à claire-voie. Ces versoirs ajourés offriraient des économies en traction et semblent améliorer l’émiettement. Pour le vérifier, Lemken France a mis à notre disposition deux charrues portées à cinq corps réversibles identiques à l'exception de leurs versoirs, standards pour l'une et à claire-voie pour l'autre. À l'automne 2022, sur une parcelle à tendance argileuse, les deux Juwel 8 MVU ont réellement fourni des résultats disparates jusqu’au travail du lit de semence.

Comparatif entre deux charrues Lemken Juwel 8 MVU

Une charrue équipée de versoirs classiques contre une seconde équipée de versoirs à claire-voie 

Historiquement, les versoirs à claire-voie ont été conçus pour les sols les plus argileux. En limitant la surface en friction des textures les plus collantes, ces charrues sont en effet plus faciles à tracter, et le retournement de la bande de terre plus efficace. C’est donc d’abord autour des charrues à eau et des rotobêches que les versoirs composés de lamelles se sont développés. Depuis plusieurs années pourtant, on observe davantage de charrues avec versoirs à claire-voie dans des secteurs limoneux à sableux. Ce choix d’équipement peut paraître contradictoire compte tenu de l’usure plus prononcée dans ces types de sols et de la plus forte pression de terre sur les lamelles qui composent les versoirs. Pourtant, ces derniers semblent ne plus être aussi spécifiques que prévu.

 

Sont-ils si polyvalents qu'on les retrouve dans tous les types de sols, y compris pierreux ?

Pour cet essai comparatif, la charrue à versoirs pleins de Lemken, dénommée « W40B », correspond à une forme cylindro-hélicoïdale. Le nombre 40 désignant sa longueur en pouces, elle sera donc comparée à une charrue à claire-voie munie de versoirs CS40. Avec son apparence ajourée, il ne faut pas espérer gagner en capacité de relevage puisque les lames qui forment chaque corps sont bien plus épaisses afin de compenser une usure plus rapide, tout en conservant une rigidité en terre.

Un affrontement corps à corps

L’objectif de l’essai est d'évaluer le comportement de deux charrues à cinq corps réversibles identiques munies de versoirs différents. Les mesures de consommation et d’émiettement permettront de comparer les corps à versoirs pleins avec ceux qui reçoivent des lames dites « à claire-voie ». Le labour a été réalisé le 18 octobre 2022 dans une parcelle de ray-grass italien. La résistance du sol a été mesurée au pénétromètre sur trois profils de profondeurs :

- 0-25 cm : jusqu’à 150 PSI (10,55 kg/cm²);

- 25-40 cm : de 200 à 250 PSI (14,06 kg/cm² à 17,58 kg/cm²);

- au-delà de 40 cm : plus de 250 PSI (plus de 17,58 kg/cm²).

Les yeux les plus habitués pourront aisément distinguer les zones travaillées par chaque charrue. Chez Lemken, la dénomination W40B correspond aux versoirs pleins, et la référence CS40 aux corps à claire-voie.

La profondeur de travail a été réglée à 30 cm pour faciliter la conduite du tracteur à pleine charge et toujours dans le même sens de pente. Il a donc été possible de comparer les consommations dans des configurations de débit de chantier maximal. Tous les autres réglages ont été reportés d’une charrue à l’autre pour garantir des conditions d’essai identiques. La qualité d’émiettement a été évaluée à vitesse similaire.

L’identification des réglages est très claire et facilite grandement la prise en main de la charrue dès sa mise en route.

La consommation à l’hectare et la finesse du lit de semence ont été jugées pendant la reprise du labour avec une herse rotative fournie par Lemken France. Le passage de cette dernière a également permis de jauger l’agressivité des versoirs et leur sobriété pour arbitrer une économie indirecte potentielle. Quatre mesures au labour, dans le même sens de travail, ont été réalisées pour chaque type de versoir. Le gain en matière de vitesse d’avancement est limité, tandis que la consommation diminue de 2,16 % en faveur de la charrue à claire-voie (CS40).

Avec une vitesse d’avancement moyenne de 5,7 km/h, la reprise du labour avec les versoirs à claire-voie a généré une économie de 2,59 % à l’hectare.

Même si, sur le plan des performances moyennes, les corps à claire-voie prennent l'avantage, la différence de consommation n’est pas évidente si l’on se penche sur le détail des quatre répétitions.

  Vitesse (km/h) Conso (L/ha)
W40B (classique) 5,8 23,2
5,6 23,8
5,8 23,2
6 22,2
Moyenne W40B 5,8 23,1
  Vitesse (km/h) Conso (L/ha)
CS40 (à claire-voie) 6,1 22,1
6,1 21,8
5,6 23,2
5,8 23,3
Moyenne CS40 5,9 22,6
Ecart (%) CS40/W40B 1,72 -2,16

 

Chaque modalité de labour a été travaillée par une herse rotative Lemken Zirkon 12 de 4,5 m de largeur. La barre de nivellement et le régime des rotors ont été réglés de manière identique. La variabilité des vitesses d’avancement ne permet pas de conclure à une différence de débit de chantier majeure. Cependant, la consommation est encore une fois favorable à la modalité précédée des versoirs à claire-voie dans les mêmes proportions que le labour. En cumulant les deux pratiques culturales, l’économie est de 0,9 L/ha et ne permet donc pas de promouvoir une technologie de corps uniquement sur des aspects de sobriété. Cette marge d’économie est bien plus impactée par une profondeur de travail réduite de quelques centimètres. Un seul type de sol a été utilisé pour ce comparatif : il n’est donc pas possible de savoir si une texture plus ou moins sableuse peut accentuer ou atténuer l’écart de consommation.

Selon Lemken, plusieurs détails peuvent améliorer la sobriété de la charrue. Sur les Juwel 8 MVU de notre comparatif, l’angle d’entrure est réglable, à l'aide d'une vis, sur l’étançon et le sep. Les pointes, quant à elles, sont boulonnées sur le même plan que le soc, sans surépaisseur.

A lire aussi : Essai Semoir de précision Lemken Azurit 10 : simple VS double rang, le match !

Plus d’émiettement, même en argile

Dès la réalisation des deux labours, les personnes présentes lors de l’essai sont unanimes dans la parcelle : c’est plus motteux après le passage des versoirs pleins. L'évaluation de l’émiettement s'effectue tout d’abord visuellement à la surface du labour. Sans mesurer la granulométrie des mottes, les observateurs distinguent nettement les zones davantage lissées par les versoirs pleins. En utilisant un cadre de 1 m2 posé sur les différents labours, ils notent surtout que ces écarts de lissage entre les mottes illustrent une compaction sur le versoir. Il s'avère difficile de conclure à une différence d’émiettement, celle-ci devant être évaluée en profondeur dans un second temps. En effet, seul un triage granulométrique sur la profondeur de labour permet de juger de l’intensité d’émiettement de chaque modalité. Cette évaluation atteste que le travail fourni par la charrue munie de versoirs pleins W40B est plus grossier. La forme des mottes moins anguleuses après le labour à claire-voie confirme une compaction mécanique des agrégats du sol.

 

Le niveau d'émiettement a été évalué visuellement après le passage de la herse rotative à l'aide du cadre en surface de la reprise de labour. Les mottes plus grossières demeurent à la suite du labour en versoirs pleins. Le prélèvement de terre après le passage de la herse sur la profondeur de travail permet d’évaluer l’intensité d’émiettement. Les deux photos suivantes illustrent le résultat de triage granulométrique pour un réglage et une vitesse de herse rotative identiques. La charrue munie de versoirs à claire-voie confirme un travail plus agressif, y compris en reprise de labour.

 

Conclusion

La comparaison entre les deux types de versoirs sur une même charrue n’a pas permis de mettre en évidence un écart de consommation ou de débit de chantier significatif. Cependant, toutes les mesures de qualité de l’émiettement confirment une agressivité plus importante pour la modalité à claire-voie. Cette performance n’est pas uniquement agronomique. En effet, pour obtenir le même résultat avec la charrue à versoir pleins, il aurait fallu : 

- soit augmenter la vitesse du labour, donc la puissance du tracteur, ce qui aurait eu un impact négatif sur la consommation à l’hectare ;

- soit, lors du passage de la herse rotative, ralentir la vitesse d’avancement, abaisser la barre de nivellement ou augmenter le régime des rotors, donc accroître la consommation à l’hectare tout en pénalisant le débit de chantier.

Même si la différence de consommation absolue ne s'avère pas significative entre les deux types de versoirs, la mesure de l’émiettement permet de reconsidérer cette approche. La consommation relative est bien différente. Autrement dit, il aurait fallu dépenser bien plus d’énergie en vitesse d’avancement avec les versoirs pleins – et donc en puissance – pour atteindre le même niveau d’émiettement qu'avec les versoirs à claire-voie CS40. Ces derniers génèrent donc indirectement une baisse de consommation par l’atteinte d’un émiettement plus intense. Pour parvenir au même résultat avec des versoirs pleins, il en résulte un moins bon rendement énergétique pour le même résultat avec un versoir plein. 

 

Près de 200 modèles de charrues

Chez Lemken, les charrues Juwel 7, 8 et 10 correspondent aux modèles portés, les Diamant 16 aux déclinaisons semi-portées monoroues, et les Titan 18 aux châssis semi-portés sur chariot. La série Juwel, qui nous intéresse dans ce comparatif, offre donc une variété importante de versions. Les numéros 7, 8 et 10 indiquent principalement des différences de diamètre de fusée de retournement ou de section de poutre. Des étançons plus épais distinguent également la Juwel 10 de ses consœurs. Lemken propose ainsi une multitude de possibilités de dégagement sous bâti et de distances entre pointes, dans sa seule gamme portée. Pour notre essai, le constructeur a mis à notre disposition deux Juwel 8 MVU pour lesquelles les réglages et le tracteur utilisés étaient identiques. La première lettre du sigle MVU indique que le réglage de la butée d’aplomb est mécanique. La deuxième désigne l'ajustage hydraulique de la largeur de travail (de 33 à 55 cm). La dernière informe sur le type de déclenchement de la sécurité non-stop, qui est ici hydraulique (X pour mécanique).

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