Nous avons eu la chance d’être parmi les premiers à essayer l’un des tout derniers Serie 6 de Deutz-Fahr. Pour l’occasion, le lycée agricole de Saint-Yrieix-la-Perche, dans la Haute-Vienne, nous a concocté un programme choc pour le mettre à l’épreuve. Nous commencerons par de l'épandage de fumier avec l’épandeur Deguillaume de 16 m3 de l’exploitation du lycée, avec lequel nous emprunterons les routes, et terminerons par un déchaumage avec un Horsch Joker de 3 m de large. Si ces outils peuvent sembler sous-dimensionnés, attendez de voir la parcelle. Cette dernière accueillait un verger l’année précédente. L’arrachage et les multiples déplacements ont laissé un sol cahoteux et extrêmement compacté en surface et, en plus, le champ présente un fort dénivelé. De quoi mettre à l’épreuve la transmission, le confort de l’utilisateur et la capacité de traction de notre 6180 TTV en réglant le Joker avec une bonne profondeur de travail.
Transmission revue, mais pilotage conservé
Lors de son arrivée dans la cour, le modèle le plus puissant des cinq nouveaux tracteurs de la Serie 6 de Deutz-Fahr lancés l’automne dernier ne surprend pas par son design, qui ne montre aucun changement radical. Les nouveaux venus ne remplacent d’ailleurs pas le reste des modèles proposés mais complètent la gamme et laissent entrevoir le futur des équipements du constructeur. Notre tracteur abrite un bloc-moteur Deutz AG à six cylindres de 6,1 L, dont la puissance maximale est annoncée à 181 ch. Il offre en outre un boost de 10 ch supplémentaires avec l’utilisation de la prise de force ou au transport. Côté transmission, le tractoriste allemand reste fidèle à la variation continue fournie par le Bavarois ZF. Celle-ci, un modèle Terramatic équipé de quatre rapports mécaniques et d’un module hydrostatique, remplace la version Eccom. Pour tester son comportement et la facilité de prise en main, je me dirige vers la ferme du lycée pour épandre du fumier. Après avoir attelé l'épandeur, je profite du moment durant lequel mon collègue charge la caisse pour anticiper les réglages et la manipulation de cette transmission. Si elle s'avère techniquement différente, son pilotage, offrant trois modes de conduite (auto, manuel et PDF), reste identique à celui de la version précédente. En mode auto, pas de gestion de l’avancement au joystick. Pousser ou tirer ce dernier modifie uniquement la vitesse maximale souhaitée, entre 0 et 50 km/h. C'est par l'appui sur la pédale d’accélérateur que je peux jouer sur l’avancement du tracteur dans la plage sélectionnée au préalable. En outre, le chauffeur dispose de deux vitesses cibles. Il passe de l'une à l'autre via deux boutons "cruise" sur le Joystick. Si ce mode de conduite a compliqué ma prise en main, il présente toutefois l’avantage de régler aisément la vitesse cible en continu. Le joystick n’est pas le plus précis, mais une molette permet d’affiner la vitesse cible. Il offre ainsi un potentiel à qui va l’utiliser au quotidien pour s’adapter rapidement à des changements de conditions. En outre, la réactivité de la TTV se règle facilement via une molette. L’accélération peut alors être plus franche ou plus souple, selon les besoins. Une autre molette sur l’accoudoir facilite ensuite le réglage du superviseur du régime moteur, la plage des régimes autorisés s’affichant alors sur le tableau de bord. Pouvoir intervenir sur ces réglages, habituellement poussés, grâce à une simple molette me dispense de naviguer dans le terminal.
En mode manuel, le chauffeur doit, en plus, gérer le régime moteur à l’aide d’un accélérateur à main ou à l'inverse, gérer l'accélération à la pédale et l'avancement avec le Joystick. En mode PDF, le tracteur donne automatiquement la priorité au maintien du régime moteur sur la vitesse d’avancement en cas de surcharge, le but étant de maintenir un régime de prise de force constant. C’est ce mode que je choisis pour épandre afin de conserver un travail précis et de qualité. Une fois l’épandeur rempli, il est temps de se lancer. Je règle la vitesse maximale à 12 km/h et maintiens le régime moteur grâce à l’accélérateur à main pour obtenir 1 000 tr/min à la prise de force. C’est parti, j’appuie sur la pédale. La TTV se montre réactive, atteignant rapidement mais en douceur la butée de vitesse. En appuyant sur le bouton de mémorisation de l'allure présent sur le joystick, je peux mettre de côté la pédale, puisque le tracteur va chercher à atteindre automatiquement la vitesse enregistrée. Un régime constant est maintenu, variant seulement de plus ou moins 50 tr/min tout au long de l’accélération grâce aux réglages évoqués précédemment. Lors des divers allers-retours entre la parcelle et le tas de fumier, je modifie rapidement la plage de fonctionnement de la transmission grâce au joystick. Pour atteindre sa vitesse maximale sur la route, le tracteur, même chargé, ne donne aucun à-coup lors des changements automatiques de rapport. Bilan plutôt positif, donc, pour cette nouvelle TTV qui, malgré un mode de conduite à la pédale uniquement, facilite des réglages habituellement compliqués à mettre en œuvre. Son comportement sur la route comme dans la parcelle répond, quant à lui, à mes demandes. Le tracteur circule dans les plages de vitesse sans rupture, et mes interventions sur les réglages se font directement ressentir. Une fois ces derniers adaptés aux conditions, la conduite est un réel plaisir.
Une cabine bien connue

Dans la parcelle jonchée de branchages, pleine de trous et d'autres imperfections, le confort du conducteur, à une vitesse de 12 km/h, devrait être mis à rude épreuve. Pourtant, à bord de ce 6180 TTV, les secousses sont absorbées grâce à la suspension du pont avant, de la cabine et du siège pneumatique. Je reste ainsi maître du véhicule et apte à modifier les réglages, même dans les endroits les plus cahoteux. Cette cabine, qui est d’ailleurs sensiblement semblable à celle des tracteurs des séries précédentes, propose néanmoins des éléments de confort plus récents. Je vous laisse juge de l’esthétique, mais un petit coup de jeune sur l’intérieur ne serait pas de refus.
En revanche, l’ergonomie est bonne, les commandes accessibles, et les informations lisibles, que ce soit sur l’ordinateur de bord derrière le volant ou sur le terminal iMonitor de 12” qui figure au catalogue des options. Ce dernier regroupe l’intégralité des réglages du tracteur. Les allergiques aux écrans pourront quant à eux régler les principaux paramètres depuis les commandes réparties sur le montant, dans le plafonnier et sur l’accoudoir multifonction, dont le code couleur propre à la marque reste inchangé depuis la génération MK1 des Agrotron, soit depuis plus de vingt ans. Globalement, l’essentiel des commandes tombe sous la main rapidement.



L’écran iMonitor tactile, présent sur notre modèle d’essai, a pour sa part été amélioré sur cette nouvelle Serie 6. La version 5 de son système d’exploitation Horizon est bien plus réactive. Je retrouve le même plaisir de navigation que sur un smartphone. Les icônes sont claires, et la circulation entre les menus n’est pas trop dense. Je ne m’y perds pas et parviens à atteindre la majorité des réglages en quelques pressions du doigt. Pour l’épandage, je crée rapidement une tâche ainsi qu’une ligne GPS, sans avoir à passer par le processus de création de « ferme et parcelle » de la version précédente. Une fois la largeur de travail renseignée et les deux points placés, la tâche se lance en quelques secondes seulement. L’autoguidage s’active via un bouton configurable sur le joystick, que j’ai précédemment réglé depuis l’écran. Je regrette un peu le fait de n’avoir qu’une seule séquence de bout de champ, sur laquelle je dois par conséquent programmer l'entrée en fourrière et la sortie, ce qui prend un peu plus de temps. Mais ce n’est qu’un détail. En revanche, Deutz-Fahr se démarque par son application XTend. En effet, je peux afficher l’interface Isobus ou le guidage sur mon téléphone ou une tablette connectés en wi-fi avec le iMonitor, depuis l’intérieur ou l’extérieur de la cabine. J’imagine plusieurs autres applications comme le calibrage du semoir ou du distributeur à engrais sans monter et descendre sans cesse de la cabine, ou encore l'utilisation de mon smartphone comme deuxième écran pour mon tracteur. Un rail avec une attache pour téléphone ou tablette est d’ailleurs présent sur le côté droit de la cabine. Un point positif donc.

Ponts plus costauds
Pour accompagner l’arrivée de la transmission Terramatic, Deutz-Fahr installe des ponts plus conséquents sur son 6180 TTV. Le PTAC du tracteur est de 13,5 t, et la capacité de relevage atteint 9,7 t. Malgré un empattement de 2,76 m, le tracteur n'est pas le plus agile pour circuler entre les bâtiments de l’exploitation. J’attelle à présent le déchaumeur Horsch Joker pour enfouir le fumier épandu dans la parcelle. La profondeur de travail se règle rapidement grâce à la roulette et à la butée basse de relevage. Je paramètre la profondeur de l'outil à 15 cm. La terre est tellement tassée que les disques pénètrent le sol péniblement. En revanche, une fois ces derniers en terre, le tracteur file à une allure supérieure à 11 km/h. Malgré le relief et la difficulté de pénétration des pièces travaillantes, le tracteur conserve une bonne adhérence, renforcée par sa suspension de pont avant dite « active ». Dans les courbes, lors des déplacements routiers, cette suspension dispose d’un mode compensant la force centrifuge en penchant le tracteur à l’intérieur du virage. J’ai pu l’apprécier lors des trajets vers la parcelle avec l’épandeur et le déchaumeur. Ce système est gage de sécurité.
La journée terminée, il est temps de dresser le bilan de ce nouveau 6180 TTV. Si son environnement et son mode de conduite particulier peuvent allonger la prise en main, je me suis tout de même vite aperçu que ce tracteur offrait de nombreuses possibilités. En cabine, les réglages de la transmission tombent sous la main. Après quelques heures pour l’apprivoiser, il m'est réellement difficile de me séparer de ce véritable compagnon. Il offre également un bon niveau de polyvalence, de performance ou encore de confort pour les divers travaux de l’exploitation. Il fait donc bon l’avoir à ses côtés au quotidien afin de l’exploiter à son plein potentiel.
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