Pour être rentable, un andaineur à tapis doit pouvoir aligner les hectares, mais aussi ne pas être trop coûteux en entretien. Capable d’offrir un débit de chantier élevé tout en offrant un andainage respectueux de la qualité du fourrage, ce type d’appareil affiche toutefois une efficacité et une usure qui sont très dépendantes des conditions de récolte et de l’expertise du chauffeur. Romain Desvignes, responsable commercial chez Reiter, et David Leroyer, chef produit chargé des modèles Roc et Kubota pour le groupe Kverneland, apportent leur éclairage.

« L’andaineur à tapis n’est pas une baguette magique. Il va, par exemple, être directement impacté par une fauche inadaptée, explique Romain Desvignes. Un ray-grass devant maïs souvent fauché trop bas va compliquer le ramassage par le pick-up et engendrer de l’usure. La hauteur de fauche doit se situer entre 7 et 10 cm pour avoir une nappe de fourrage facile à soulever. » Le mode de fauche a également une incidence sur le fonctionnement de l’andaineur. « Sur des coupes multiples avec de petits volumes d’herbe, il y a très peu de contraintes. En revanche, dans un ray-grass ou un seigle volumineux fauchés à plat, l’andaineur est fortement sollicité, aussi bien au niveau des pick-up que des tapis, les brins longs étant propices aux enroulements. Il est alors préférable d’andainer dans le sens contraire de la fauche ou de se décaler d’un angle de 10-15° par rapport aux passages de la faucheuse », poursuit le spécialiste. D’autres produits sont particulièrement contraignants à andainer. « En paille, on a tendance à monter plus de terre, illustre David Leroyer. Attention également aux cannes de maïs qui sollicitent fortement l’appareil. Quant au chanvre, l’andaineur à tapis y est proscrit, sous peine d’enroulements intempestifs. » La durée de vie des andaineurs à tapis est ainsi très dépendante des produits récoltés et de la hauteur de fauche.
Pour s’adapter à la variabilité des conditions de récolte, le savoir-faire du chauffeur est un aspect déterminant. « La mise en route d’un andaineur à tapis est cruciale, avertit David Leroyer. C’est un outil beaucoup plus complexe à régler qu’un modèle à rotors. L’utilisateur doit intégrer les différents paramètres sur lesquels il peut agir pour que l’appareil fonctionne de manière optimale : hauteur de ramassage, vitesse du pick-up et des tapis, configuration d’andainage, vitesse de travail… » Il faut parfois déconstruire certaines idées reçues, comme le confirme Romain Desvignes : « Un andaineur à tapis a la capacité d’intervenir à vive allure quand les conditions sont réunies, notamment en présence de fourrages secs et peu volumineux. Mais quand la matière est lourde et humide, il ira parfois moins vite qu’un modèle à rotors. Il faut aussi veiller à toujours bien adapter les vitesses de rotation des pick-up et des tapis lorsqu’on ralentit ou qu’on accélère, sauf si l’appareil dispose d’une régulation proportionnelle à l’avancement. » Attention également aux préconisations de réglages qui peuvent varier d’un appareil à l’autre. « L’ajustement de la vitesse d’un pick-up sans cames peut parfois être à l’opposé d’un modèle avec cames », illustre le responsable commercial.

Une fois intégrées toutes les subtilités de l’andainage à tapis, le bon vieillissement de l’outil et la maîtrise des coûts reposent sur un entretien régulier. « À titre d’exemple, les frais d’entretien de nos appareils Roc utilisés pour la récolte de luzerne des unités de déshydratation sont compris entre 3 000 et 4 000 € par an pour une surface travaillée de 20 000 à 30 000 ha. Ces machines bénéficient d’une maintenance méticuleuse, certaines atteignent jusqu’à dix ans d’utilisation », indique David Leroyer. Une inspection journalière est conseillée pour vérifier le bon état des pick-up et des tapis. « Il faut être particulièrement vigilant aux enroulements de matière, notamment au niveau des organes d’entraînement des tapis », pointe Romain Desvignes. Ce sera aussi l’occasion de passer en revue tous les points de graissage : paliers, axes, articulations… Pour gagner du temps, les constructeurs proposent des dispositifs de graissage centralisé, mais leur coût approchant les 10 000 € peut toutefois faire hésiter. « Le graissage centralisé est avantageux en délivrant la bonne dose de graisse sur l’outil en fonctionnement, à condition de maintenir une inspection régulière de l’andaineur », avertit David Leroyer.


Une vérification plus approfondie peut être réalisée toutes les 50 heures. Les modèles dotés d’un pick-up à cames demandent plus d’attention, du fait d’un plus grand nombre de pièces en mouvement. La tension des tapis est aussi un point de vigilance. « On préconise de démonter un élément de tapis une fois par semaine pour s’assurer de l’absence d’encrassement et ainsi éviter les contraintes sur le tapis », indique David Leroyer. Dans les pièces d’usure à contrôler régulièrement figurent les patins régulant la hauteur de travail et assurant le suivi du sol. « Sur des sols agressifs et avec des récoltes lourdes, les pièces d’usure de nos patins rotatifs ne feront pas 1 000 heures, alors que, en multicoupe sur des sols peu abrasifs, ils atteignent 3 000 heures », observe Romain Desvignes.


La durée de vie des patins est souvent conditionnée par le poids qu’ils supportent, un critère dépendant du type de produit récolté, de la conception du châssis et de l’efficacité des suspensions. « Chez Roc, on a fait le choix de roues tandem en association avec des patins. Les roues roulent sur le sol sans marquer la surface et sans risque d’étincelles en conditions pierreuses, précise David Leroyer. Les patins sont là uniquement en sécurité, au cas où les roues tombent dans un trou. Leur usure est ainsi très limitée. » Sur la partie hydraulique, la principale intervention concerne la vidange du circuit, préconisée en général toutes les 1 000 heures, un changement des filtres pouvant intervenir toutes les 500 heures. Ces centrales hydrauliques indépendantes embarquent de grands volumes d’huile, atteignant jusqu’à 400 L sur certains modèles. Ceux qui disposent d’un système de refroidissement limitent toutefois la contenance de leur réserve, comme celle de 180 L du Reiter.
