En Bretagne, la reprise des entreprises se féminise. Seules ou associées, les femmes dirigeantes n’ont pas la langue dans leur poche et avancent fièrement, confiantes dans les atouts qu’elles apportent à leur entreprise. Fini le cliché d’un service administratif qui lui serait réservé : cette nouvelle génération n’hésite pas à prendre ses responsabilités quand c’est nécessaire.
Parmi elles, Manon Leost a repris les rênes de l’entreprise familiale avec trois anciens salariés en début d’année 2024, nourris d’une volonté de lui donner un nouvel élan. Quand la question de la reprise s’est posée au départ de ses parents, elle n’a pas hésité. « J’apprécie la diversité de mes missions telles que l’élaboration des plannings, la facturation, la relation client, de même que les déplacements pour ravitailler en carburant et en pièces, ou pour convoyer les machines. C’est un métier de services qui n’est pas du tout monotone », témoigne la jeune femme, cogérante de l’ETA 4 Ouest implantée à Plouédern dans le Finistère. Après un BTS ACSE (analyse, conduite et stratégie de l’entreprise agricole) et une licence professionnelle MCE (métiers du conseil en élevage), elle a travaillé en tant que conseillère en environnement chez Eureden, puis comme commerciale chez BouMatic, avant d’intégrer l’entreprise de ses parents en avril 2022.
Confiance et complémentarité
Même si sa volonté de poursuivre l’aventure était indéniable, Manon Leost a décidé de ne pas faire cavalier seul pour gérer l’entreprise et de s’appuyer sur les compétences de trois anciens salariés : « Nous avons trouvé une complémentarité en instaurant une relation de confiance mutuelle. Mathieu, Nicolas et Jean-Christophe s’occupent de l’atelier et des investissements en matériels. En raison de leur expérience au sein de l’entreprise, ils sont très investis. De plus, leur connaissance des clients, des parcelles et de la technique facilite la gestion des plannings et les choix d’investissement. » Les décisions importantes sont prises en concertation, qu’il s’agisse des choix d’investissement ou de l’embauche d’un salarié. Les quatre associés ont la volonté commune de véhiculer une bonne image de l’entreprise en apportant un service de qualité et une convivialité des échanges.
Au fil du temps, Manon Leost a gagné en assurance, tout en s’imprégnant du fonctionnement mis en place par sa mère, qui lui a transmis les ficelles du métier. C’est non sans fierté qu’elle suit son chemin, apportant sa personnalité pour trouver son rythme de croisière. « La gestion d’une entreprise de travaux agricoles nécessite d’avoir les épaules solides et de jongler entre les différentes missions. De plus, il faut s’adapter à la diversité des clients que nous côtoyons et temporiser certaines fois », note la jeune associée. « Les femmes ont un rôle à jouer dans les entreprises. Nous apportons de la souplesse dans les relations humaines. Nos interlocuteurs font généralement plus attention à leur langage face à nous. Nous contribuons à créer une ambiance familiale propice à la fidélisation des salariés », ajoute-t-elle. Force est de constater combien ses associés apprécient son implication dans la gestion de l’entreprise qui ne se résume pas aux seules tâches administratives. « Je trouve cela positif qu’une femme soit également à la tête d’une entreprise, car sa façon de faire et de penser se distingue des nôtres et apporte un plus, souligne Nicolas Morvan, l’un des associés. Manon est carrée quand c’est nécessaire, tout en étant bienveillante vis-à-vis des clients qui peuvent avoir des demandes concernant l’organisation des chantiers et les tarifs de prestations. »
Un partage des tâches
Du haut de ses 25 ans, Lisa Feudé montre également une motivation sans faille depuis sa reprise de la SARL Feudé en mars 2024 avec son frère Kevin. Cette entreprise familiale située à Calorguen, dans les Côtes-d’Armor, était précédemment dirigée par leur père, Michel, et leur oncle Yannick. La jeune femme s’est donné les moyens pour être à la hauteur de la situation. Après un bac technologique ST2S et des études universitaires en sciences et techniques des activités physiques et sportives, elle a suivi la formation de conducteur de travaux en ETA (CTETA) à Montfort-sur-Meu (Ille-et-Vilaine). Dans ce cadre, elle a également obtenu le Certiphyto « décideur » à l’issue d’une semaine intense de formation sur la réglementation phytosanitaire. Seule femme dans le groupe de formation, elle s’est toutefois sentie à sa place et bien intégrée. « C’était la formation la plus adéquate pour intégrer l’entreprise dans les meilleures conditions, indique-t-elle. Cela m’a permis d’appréhender les bilans comptables et les coûts de revient, des notions de gestion que je ne maîtrisais pas. De plus, j’ai réalisé mes stages dans l’entreprise familiale et visité d’autres structures pour m’imprégner de leur vécu et des améliorations possibles à apporter. » Elle réalise les tâches administratives et managériales (factures, salaires, contrats de travail…), tandis que son frère est le référent technique. Cependant, pour maintenir la relation client, elle réalise sur le terrain des prestations comme les travaux du sol et le transport lors de l’ensilage. « Malgré quelques réticences, j’ai fait mes preuves. C’est important de montrer que la place d’une femme n’est pas seulement au bureau », se réjouit-elle. Les deux jeunes repreneurs, complémentaires, partagent les mêmes valeurs. Ils ont renouvelé une partie du parc et ambitionnent d’agrandir et de moderniser les bâtiments. Preuve que la nouvelle génération va de l’avant et que les femmes y contribuent largement.
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