Irrigation SCEA de La Forge : 40 % d’eau en moins avec la modulation de l’irrigation

Après la modulation intraparcellaire des intrants et des semis, c’est au tour de l’irrigation d’y passer. Ghislain de La Forge, exploitant près de 200 ha de SAU en agriculture conventionnelle dans le Loiret, a sauté le pas en 2021 et installé la solution de la marque Lindsay : un pivot Zimmatic Precision VRI (variable rate irrigation, soit « irrigation à débit variable ») de près de 440 m. Son objectif ? Optimiser ses apports d’eau pour répondre précisément aux besoins de la culture et donc lisser l’hétérogénéité des parcelles. Il en résulte une économie non négligeable de la ressource, qui lui permet de respecter les quotas, et même d’en faire profiter d’autres cultures de l’exploitation. « Nous gagnons déjà en précision grâce à la modulation des intrants et des semis. Pour l’irrigation, c’est le même principe : il faut appliquer la bonne dose, au bon endroit et au bon moment », indique Ghislain de La Forge.

« La bonne dose, au bon endroit »

« À la suite d’un départ en retraite d’un associé en 2020, la question d’optimiser notre système d’irrigation pour dégager du temps est devenue cruciale », raconte l’agriculteur. La ferme basée à Marsainvilliers, irrigable sur toute sa surface, comptait à l’époque déjà deux pivots Otech, de 270 et 324 m. Installés en 2008, ils couvraient 70 ha de parcellaire. Le reste est irrigué à l’aide d’enrouleurs. L’exploitation puise dans la nappe de Beauce et est soumise à un quota de près de 200 000 m³ à l’année. L’économie de cette ressource est alors fondamentale. Le Loirétain décide de s’équiper de la solution VRI de l’Américain Lindsay, tout juste arrivée en France.

Monté en novembre 2021, le pivot de 409 m de longueur se complète d’un porte-à-faux rétractable de 28 m afin de suivre au mieux le contour de la parcelle. L’ensemble tourne d’abord sans modulation lors de la saison 2022 avec un passage dans du blé. L’irrigation devient déjà plus efficiente et ne nécessite plus les 16 positions d’enrouleurs habituelles. L’année suivante, l’exploitant implante la parcelle de maïs grain et s’entoure des conseillers de la chambre d'agriculture locale pour être accompagné et tirer des conclusions après une saison d’utilisation (voir encadré).

« Avant de commencer la modulation, nous avons analysé la parcelle dans son ensemble pour la séparer en cinq zones selon la nature du sol, explique l’agriculteur. Ensuite, nous avons effectué des analyses pour définir le potentiel de réserve en eau de chacune de ces zones. » Les typologies de sol vont de l’argilo-calcaire très superficiel, à 36 cm, au limon-argileux profond, de 90 cm. Les réserves utiles maximales en eau s’échelonnent, quant à elles, de 48 à 155 mm selon les endroits. Ces données lui ont permis de suivre en temps réel les besoins en eau des différentes zones à l’aide de l’application Net-Irrig par Seabex. Une fois la culture et son type de sol ajoutés, l'OAD (outil d’aide à la décision) se base sur les données météorologiques et d’irrigation pour estimer la quantité d’eau disponible pour la culture, selon son stade. En la comparant régulièrement à un seuil de déclenchement, anticipant un stress hydrique, l’agriculteur décide de la date ainsi que de la quantité d’eau à apporter.

« Je me base sur la zone la plus faible, qui souffrira en premier du manque d’eau, pour définir la dose maximale à appliquer, précise Ghislain de La Forge. Puis j’apporte un pourcentage de cette dose sur les autres zones, par exemple 60, 40, 20 et 0 %. » Ainsi, certaines zones, plus profondes, ne nécessitent pas forcément d’apport d’eau à chaque passage.

Économies d’eau, mais pas seulement

Sur le pivot, les 96 asperseurs, espacés de 4,6 m, travaillent chacun sur 6,5 m de large et disposent de leur propre électrovanne indépendante. À l’image d’un pulvérisateur doté de la coupure de tronçon, ils sont pilotés quatre par quatre par un boîtier, pour leur ouverture/fermeture selon la carte de préconisation. Pour exécuter celle-ci avec précision, leur position ainsi que celle du pivot sont connues via des antennes GPS. « Le système permet alors d’apporter potentiellement une dose d’irrigation différente tous les trois arroseurs », explique l’agriculteur. Résultat : « La parcelle n’est jamais sur- ou sous-irriguée, et les terres superficielles ne sont jamais amenées au ruissellement », note-t-il.

En fin de saison, la parcelle totalise de 86 à 171 mm/m² d’irrigation selon les zones. Après observation des cartes de rendement des surfaces, les délimitations selon le type de sol ne sont plus visibles, signe que l’hétérogénéité a été totalement lissée. Certaines parties à faible potentiel atteignent même des rendements parmi les plus élevés de la parcelle. « Nous sommes dans notre moyenne décennale avec 131,5 q/ha sec de maïs grain. Nous avons cependant baissé en humidité, avec 19,4 % contre environ 22 % pour les voisins, se félicite Ghislain de La Forge. Cette baisse impacte directement les frais de séchage, ce qui n’est pas négligeable. » En plus du temps gagné pendant la saison d’irrigation, le fonctionnement du pivot à régime réduit libère également du potentiel sur la pompe pour irriguer d’autres parcelles.

« À terme, en fonction des rotations, je pourrais être amené à diviser cette parcelle en deux, voire plus, et je serais capable de différencier les apports d’eau selon la culture, en plus des zonages de réserve utile », indique le jeune agriculteur. À la suite de ces essais concluants, Ghislain de La Forge étudie la possibilité d’équiper ses deux pivots existants de la solution de modulation VRI pour optimiser encore davantage les cycles d’irrigation de la ferme.

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