« L’ETA Bridonneau a été créée en 1952 à Longeville-sur-Mer, en Vendée, par mon grand-père, explique Mickaël Bridonneau. Mes parents ont repris la suite et j’ai rejoint la société en tant que salarié en 2006. Depuis trois ans, je dirige l’entreprise avec ma sœur Magali et son mari, Nicolas. Nous intervenons sur plusieurs milliers d’hectares chaque année en proposant tous types de prestations agricoles : de la préparation des sols à la récolte, avec des chantiers de A à Z. Comme nous cultivons aussi les terres de l’exploitation familiale, je me suis toujours intéressé à la réduction des charges de production et à l’agriculture de précision. Nous sommes donc très attentifs aux technologies qui permettent d’optimiser les applications phytosanitaires afin de baisser les doses épandues. »
C’est ainsi qu’en 2016 l’entreprise a investi dans son premier automoteur : un Condor d’Agrifac, en 36 m de largeur. Le choix de ce modèle s’explique notamment par son option Clearance, qui porte la garde au sol à 2 m de hauteur, une caractéristique appréciée de l’ETA qui intervient régulièrement dans des parcelles de maïs semences. Le pulvérisateur reçoit également le système HTA (High Tech Air) réduisant la dérive. Le principe ? Un circuit pneumatique injecte de l’air au niveau de chaque buse afin de calibrer la taille des gouttes selon la vitesse du vent. Le rideau d’air ainsi créé propulse le produit vers le sol et limite fortement la dérive. « L’efficacité est réelle, reconnaît Mickaël Bridonneau. Grâce à l’HTA, j’estime avoir diminué les doses moyennes de produit de 30 à 40 % sans perte de résultat. C’est avec ce genre d’équipements innovants que l’agriculture peut évoluer dans le bon sens. »
Un cran supplémentaire dans la technologie
L’automoteur a été renouvelé en 2022, et l’ETA a repris un modèle Condor, équipé d’une cuve de 5 000 L et d’un moteur de 300 ch. Le niveau de technologie est monté d’un cran, puisque la rampe de ce nouvel appareil se dote de caméras spécifiques, fournies par la société Carbon Bee. Les images prises en direct sur la culture sont envoyées à la console en cabine et servent à piloter individuellement l’ouverture de chaque buse (voir notre encadré « Carbon Bee »).
En optant pour la pulvérisation localisée, Mickaël Bridonneau s’est cependant trouvé confronté à un problème technique : le pilotage par caméras implique d’utiliser des buses à pulsations. Ces dernières peuvent s’ouvrir et se fermer très rapidement (jusqu’à 100 fois par seconde) afin d’assurer un débit individualisé et variable au niveau de chaque sortie, tout en disposant d’une pression unique dans le circuit. Mais cette technologie n’est pas compatible, pour le moment, avec le système antidérive HTA, où le flux d’air est calibré sur un débit de bouillie fixe. Pour faire coexister les deux solutions, le constructeur a doublé le nombre de buses, avec un support tous les 25 cm, dont un sur deux est équipé du système HTA. « Nous avons ainsi deux lignes de traitement alimentées par le même circuit, résume l’entrepreneur. Selon le chantier et les conditions météorologiques, le chauffeur utilise la première ou la seconde ligne. Dans certains cas, il peut même combiner les deux. Cela offre plusieurs modes de fonctionnement et un large choix de possibilités pour s’adapter aux conditions de vent et réaliser des traitements localisés. »
Modèles de reconnaissance
Grâce au pilotage par caméras, le chauffeur peut, par exemple, traiter en « mode spot », c’est-à-dire uniquement sur les ronds de mauvaises herbes. Il est également en mesure d’apporter un traitement en plein sur toute la parcelle, complété par un dosage supplémentaire localisé sur les zones les plus infestées. Le pulvérisateur étant équipé d’une buse tous les 25 cm, il est également possible, dans une parcelle de maïs semée à 75 cm d’écartement, de ne traiter que le rang ou, au contraire, uniquement l’interrang. En traitement localisé, toute l’efficacité repose sur le modèle de reconnaissance des adventices. Mickaël Bridonneau module donc la sensibilité des caméras, qu’il peut adapter lui-même pour fixer le seuil de déclenchement du traitement. Il prépare chaque chantier, puisque toutes les parcelles où intervient l’entreprise sont cartographiées. Le chauffeur reçoit un ordre de mission sur son smartphone, et toute l’intervention est tracée grâce à une console d’autoguidage John Deere placée en cabine.
Les plages optimales d’épandage sont déterminées en utilisant Hygo, une application météo disponible sur le portable qui indique, pour chaque traitement, la meilleure fenêtre d’intervention.
« Actuellement, nous sommes deux chauffeurs attitrés pour ce pulvérisateur, et un troisième est en formation, ajoute Mickaël Bridonneau. Ce genre de technologie nécessite un minimum de connaissances, c’est pourquoi je sensibilise régulièrement le personnel à l’agriculture de précision, via des visites chez les constructeurs ou des formations. Avec l’application localisée, j’économise entre 30 et 80 % de produit par parcelle. Sur le plan économique, cela permet de rentabiliser le coût du matériel. Sur les plans environnemental et normatif, c’est un outil qui contribuera sans doute à l’avenir à une meilleure acceptation des traitements phytosanitaires. »